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Un chemin vers la simplicité

 -- De Taizé à Assise: Un Chemin vers la simplicité --

par Philippe Wanufel, ancien élève, éducateur et professeur et ancien "Compagnon" au Collège Saint-Michel

→ voyez une courte présentation en bas de cette page ↓

Soutenir Philippe (clic!)

Les dons de 40€ (min.) sont déductibles fiscalement à hauteur de 45%.

 

octobre 2022 Philippe Wanufel, 73 jours à pied de Taizé à Assise

émission RCF radio France du 3-10-2022:  https://www.rcf.fr/culture-et-societe/le-temps-dun-cafe?episode=294268

ou fichier audio: clic! 

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juin 2022, Philippe était l'invité de "Radio Catholique Francophone".

son enregistrement: clic! (fichier audio 28 Mo) et l'articlie qui lui est consacré: clic!

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13 mai 2022, Philippe était l'invité d'Adrien de Vyver dans l'émission de la RTBF "La grande forme" https://www.rtbf.be/emission/la-grande-forme

Il a pu expliquer son projet et nommer les deux associations qu'il soutient.
extrait audio: clic!

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Mars 2022: Journée solidarité au Collège Saint-Michel.

Aujourd'hui j'ai rencontré les élèves des trois premières années du Collège Saint-Michel de Gosselies.

Une journée fatigante; je n'avais plus l'habitude de parler autant. Mais aussi une journée riche en émotions et en échanges. J'ai été agréablement surpris par leur attention durant mon exposé et par les questions souvent pertinentes qu'ils me posaient ensuite.

Cette journée s'inscrit dans le partenariat que le Collège m'a proposé avec eux dans le cadre d'une journée solidarité. Plutôt que d'aider une association extérieure comme les autres années, le Collège a accepté de soutenir personnellement pour mon aventure alpestre en tant qu'ancien élève, ancien éducateur et ancien professeur du Collège.

Je tiens ici à les remercier et plus spécialement la direction, l'économe et le responsable de la Pastorale scolaire.

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Mars 2022: article de Philippe Wanufel dans le magazine trimestriel d'arthrites asbl (en page 8)

Arthrites Mag109

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-- De Taizé à Assise: Témoignage --

par Philippe Wanufel, ancien élève, éducateur et professeur et ancien "Compagnon" au Collège Saint-Michel.

Février 2022:

Chers parents, chers amis,

Ceux qui me connaissent savent la période difficile que j'ai dû traverser suite à l'envol de l'amour de ma vie, mon épouse Françoise. Lorsque l'on perd la moitié de son cœur il faut du temps pour que les cicatrices se referment.

Dans ma reconstruction, j'ai imaginé un projet un peu fou que je vous livre ici dans les pièces attachées à ce mail: relier à pied Taizé et Assise (1200 km à travers les Alpes et les Apennins) au profit de deux associations qui me tiennent à cœur: Arthites.be et la Maison Mieux Être.

Pourquoi Taizé et Assise?

Comme (anciens) professeurs de Religion au Collège Saint Michel, Françoise et moi avons animé un groupe de réflexion appelé le Groupe Saint François. Ce nom puisque la personne de saint François d'Assise nous semble être un modèle assez intéressant pour les jeunes d'aujourd'hui dans sa propre volonté de vivre la simplicité, la joie, la méditation et la vie commune.

Nous retrouvons également toutes ces qualités chez les Frères de Taizé, Communauté que nous avons ralliée avec de nombreux jeunes en de nombreuses occasions.

C'est donc tout naturellement que je me suis dit qu'un périple de l'un à l'autre pouvait m'apporter joie, confiance et envie de simplicité.

Pourquoi ces deux associations ?

Depuis plus de 20 ans, je souffre d'une polyarthrite qui m'a obligé à prendre ma pension bien trop tôt. Heureusement, celle-ci est pour le moment en rémission. Je suis membre de l'association Arthrites.be et depuis quelques mois j'en suis même devenu le président.

Dans les derniers mois de sa vie, Françoise a eu l'occasion de profiter des soins et des services de la Maison Mieux Être de Charleroi avec des bénévoles qui viennent en aide aux personnes atteintes du cancer.

On leur prodigue des soins. On les écoute. On les aide à traverser cette période ô combien difficile.

C'est donc aussi tout naturellement que je désire remercier ces associations.

Vous imaginez bien que cette aventure demande une préparation importante en termes de nourriture, coaching, achat de matériel adéquat...

Ma petite pension ne suffit pas à une telle entreprise. C'est donc humblement que je vous demande de l'aide dans le cadre de ce périple.

Vous pouvez m'aider de différentes façons:

- soit en versant un don à l'une ou l'autre des associations;

- soit en choisissant plutôt de m'aider dans la préparation de ce voyage.

Il est évident que le solde de la somme reçue personnellement sera reversé aux associations susnommées.

Un dicton dit: " Le plus difficile dans un long voyage c'est le premier pas ".

Merci d'avance de m'aider à le faire.

Bises à tous

Philippe, Bill, Papy Bill, Wanu, Cigale, Grizzly, M.Wanufel (selon le groupe dans lequel vous m'avez connu).

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Parcours: du jeudi 28 juillet au ... septembre 2022

Jour1:

Quel premier jour!

Pour vous en faire part, je me dois de commencer par la célébration du soir à Taizé ce dimanche à laquelle je me suis fait un plaisir d'assister.

Quelle ne fût pas ma surprise en entendant la lecture de l'évangile du jour tiré de la 1re épitre aux Corinthiens: "L'amour prend patience... l'amour ne finira jamais ". Le jour anniversaire (25 mois) du départ de Françoise de cette terre et à la veille de mon départ, c'est le texte choisi pour notre mariage et pour ses funérailles qui est proposé aux Chrétiens. N'est-ce pas la preuve de sa présence à mes côtés ?

Bon, l'étape maintenant...

Levé à 6 h. pour éviter les grandes chaleurs, je démarre à 6h30 pour une promenade de 18 km sur une voie verte d'abord puis sur un GR qui devait me mener à Sainte Cécile.

Le souci c'est que j'y suis à 10h30.

Comme il ne faisait pas chaud, que j'avais encore de bonnes sensations et que j'étais certain d'avoir un bon repas, une bonne douche et un bon lit (puisque mes amis Françis et Mireille non contents de m'avoir conduit à Taizé me proposaient de venir me chercher où j'étais et de m'y ramener le lendemain), j'ai regardé la fiche de l'étape suivante et hop j'ai marché 11 kms supplémentaires afin de les retrouver dans l'après-midi.

Je rassure tout le monde: je ne ferai pas cela tous les jours mais l'occasion était trop belle de gagner un jour sans savoir ce qu'il adviendra de moi dans les prochaines semaines.

J'aurai encore plein de choses à vous raconter mais je ne veux pas vous barber avec mes histoires. Juste vous tenir au courant, vous tous qui m'encouragez et qui êtes dans mon cœur.

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Jour 2: Tramayes - Malval, 22 kms

C'est vers 9 h. que mes amis m'ont déposé sur la place de Tramayes. Je ne les remercierai jamais assez pour le service rendu et pour les beaux jours partagés avec eux.

Je prends donc la route sous un soleil voilé; cela m'arrange assez bien.

A peine parti, je me mets comme hier à faire un scanner corporel.

Mon gros orteil droit gonfle un peu. Mes épaules n'ont pas récupéré d'hier. Mon dos est douloureux.

Et puis une petite voix intérieure me dit: "Arrête de râler vieux ronchon. Profite."

Et j'ai profité.

J'ai admiré ces beaux paysages. J'ai écouté le cri du geai annonçant mon passage. J'ai assisté à la bataille volante d'une buse et d'une corneille.

J'ai cueilli les mûres mûres avant de les entendre murmurer entre mes dents en laissant se diluer leurs arômes sucrées et gorgées de soleil.

La route a passé vite surtout qu'une chanson s'inscrustait dans mon cerveau.

"La route est courte, ce serait dommage de se croiser sans se regarder. La route est courte, ce serait dommage de se croiser sans se rencontrer"..

Passage par le col d'Avenas. Quelques erreurs de direction.

Et puis arrivée à Malval pour loger au "prix pèlerins" dans une chambre d'hôte situé dans un centre équestre.

Suite demain. Je vous aime.

Jour 3: Malval - Saint Cyr le chatoux

L'annonce du décès du plus jeune frère de maman, mon oncle Jean-Pierre m'a un peu coupé le moral. Cela évoquait tant de souvenirs et le réel plaisir d'avoir grandi dans une famille nombreuse avec de nombreux cousins dont nous avons toujours autant de joie à nous rencontrer.

Tonton Jean-Pierre était un gentil, toujours accueillant avec sa famille.

A Dieu tonton. Tu seras avec moi sur mon chemin.

A propos de chemin, je vous ai quittés hier dans un gîte cavalier où j'ai passé une agréable soirée et une bonne nuit.

Ne voulant pas marcher sous la chaleur et connaissant l'étape qui m'attendait, j'ai décidé de me lever à 5 h., de déjeuner et de partir à 6 h. J'avais trois kms pour arriver à Beaujeu. J'ai eu le temps de gamberger. Je me suis étonné de ne pas encore avoir rencontré de pèlerins et donc je me suis inventé quelques personnages avec qui converser.

Je vous les présente:

- Jack, mon sac à dos

- Freddy, mon GPS

Et mes petites voix intérieures:

- Françoise, la voix de la sagesse et de la moralité

- Bill, le clown facétieux,

- Grizzly, la force tranquille,

- L'étourdi, celui qui pense et dit n'importe quoi n'importe quand,

- Phil, le mâle orgueilleux et sûr de lui,

et Benaless celle qui me rappelle de ne rien oublier lors de mes arrêts.

A peine arrivé à Beaujeu (7 h. du matin), j' ai la surprise de découvrir un marché matinal. Je vois un marchand de légumes avec de belles tomates. Au moment de lui en acheter deux, Françoise intervient en me disant qu'il faut d'abord faire le tour du marché avant d'acheter. Phil lui répond qu'on n'a pas que cela à faire et que des tomates feront l'affaire. Françoise dit quand même que des tomates dans un sac à dos. C'est vrai qu'au départ on pensait ajouter des fruits à notre repas de midi.

Nous voilà repartis, non sans que Benaless m'ai rappellé que j'avais déposé mes bâtons pour payer.

Mes enfants, pour sortir de Beaujeu, une côte à du 14 % et cela ne faisait que commencer. La matinée s'est déroulée au rythme des descentes et des montées sur des chemins caillouteux et secs où le moindre pas doit être assuré si on ne veut pas glisser ou se tordre la cheville .

A un moment, Françoise est intervenue pour demander s'il ne serait pas temps de manger. Grizzly a répondu que ce serait peut-être bien d'attendre d'être à l'ombre puisque on approchait de midi.

Et puis coup du sort, nous découvrons un endroit de pique-nique couvert où je prends mon dîner et un peu de repos.

L'étourdi lance l'idée de laisser un graffiti de plus, signe notre passage. Bill me propose d'écrire les noms de tous les petits enfants, ce à quoi Françoise rétorque que nous n'avons pas le temps de graver des souvenirs partout. Grizzly intervient pour dire que les souvenirs je dois plutôt les graver dans mon disque dur intérieur. Il commence à bien me plaire le Grizzly.

Après un rappel de Benaless de bien regarder partout, je me remets en route et là deuxième surprise, mes premiers pèlerins. Bruno et Audrey viennent de la région de Lille et ils font le chemin d'Assise en plusieurs étapes. On se donne rendez-vous à l'étape puisqu'ils logeront dans le même village que moi.

Il me reste quand même deux heures à monter et descendre pour rejoindre St-Cyr le chatoux, mon étape du soir.

Suite demain. Je vous aime. Et bonjour de tous les copains

P.s.: A tous ceux qui aiment Google, j'aimerais savoir combien de patelin français ont un Saint dans leur nom parce que depuis 3 jours c'est infernal ce que j'en vois.

Merci de l'information.

Jour 4: Saint Cyr le chatoux - Villefranche sur Saône

Quelle surprise hier soir de retrouver au gîte François (et pas Bruno) et Audrey, les deux pèlerins rencontrés dans la journée. Nous sommes accueillis par César et Bruno dans une vieille maison pleine de charme.

Après une bonne douche et quelques papotes, nous partageons à la bonne franquette un excellent repas avec entre autres des courgettes et des tomates du jardin.

Ce matin, de bonne heure pour éviter les chaleurs nous déjeunons avec Bruno, César ayant sûrement eu du mal à digérer la défaite des bleuettes.

On se dit au revoir et je pars quelques moments avant le couplé de mes nouveaux amis.

Dans la première montée, une femme en voiture s'arrête à mon niveau et me demande si je veux de l'aide. Croyez le ou non mais j'ai répondu que j'étais sur le chemin pour marcher.

Je l'ai regretté un peu plus tard car, si c'était à peu près la seule montée de la journée, c'en était une belle.

Arrivé à la superbe chapelle de ...(?) en rénovation, je me suis arrêté pour attendre mes amis lillois et leur proposer de marcher avec eux. Ce qu'ils ont accepté avec joie.

Nous avons donc quitté les monts du beaujolais pour descendre sur Villefranche-sur-Saône par les vignes.

A 12 h. nous étions arrivés et comme nous n'avions pas le même logement nous avons pris congé en espérant se revoir.

Par contre le problème quand on arrive à midi, c'est qu'il faut parfois tuer le temps. En effet je ne suis attendu chez mes logeurs qu'à 17h30.

Quelques courses, quelques visites et une très longue pause sur le banc du parc de haute claire où j'ai dîné et me voilà bientôt à sonner à leur porte.

A demain. Je vous aime.

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Jour 5: Villefranche sur Saône - Rancé

Belle soirée hier chez Jean-François et Monique où nous avons eu des discussions enrichissantes avant de déguster le saucisson beaujolais, une préparation au.... vin du terroir.

Surprise du matin: Jean-François me propose de me conduire à l'extérieur de Villefranche sur la route de Ars.

Dans l'auto j'ai eu droit aux reproches de Françoise qui me dit que je devais tout faire à pied. Pendant ce temps Bill s'amusait tandis que Benaless se demandait si j'avais bien repris ma brosse à dent et mon dentifrice dans la salle de bain.C'est encore une fois Grizzly qui a eu le dernier mot en regardant par la fenêtre les quartiers que nous traversions et en disant:"Tu n'as rien perdu de monter dans l'auto".

Arrivé de l'autre côté de la Saône me voilà sur terrain plat à 6kms seulement de Ars la patrie du Saint Curé dont l'histoire a bercé mon enfance. En effet à l'école primaire chez les frères déjà on nous racontait l'histoire de cet humble serviteur de l'Eglise. Elle a aussi été avec celle de Don Bosco une de nos premières BD. Et puis au collège le père Ghislain Denis nous a expliqué pourquoi il avait choisi comme nom d'ecclésiastique le prénom de ce Jean-Marie Vianney.

Arrivé assez tôt à Ars sur formans je décide donc de visiter. Je ne suis pas un grand fana des lieux de culte mais, entré dans la basilique ( qui, elle, n'a rien d'humble) j'ai décidé de participer à une célébration de pèlerins qui commençait.

J'ai été, je l'avoue, frappé par la ferveur et la joie de ceux-ci.

Ce qui m'a plu aussi c'est la visite de la maison de ce Curé de paroisse qui rendait bien l'idée de ce détachement des biens matériels de ce Saint homme.

Et, ô surprise, à l'entrée de la maison se trouvait le texte de la 1ère épitre aux corinthiens. Réaction directe de Françoise :" Tu vois que je suis avec toi"

Deux fois en quelques jours, il n'y a plus de hasard.

Me voici reparti pour une courte marche de 5kms vers Rancé où j'avais fini par trouver un toit pour la nuit, tous les gîtes de Saint Jean de Périgueux, mon étape étant retenu par un... concours de golf junior.

J'ai mangé sur une aire de jeux à l'entrée du village avant de me rendre chez Jean-Pierre et Denise qui m'accueillent en ce jour.

A demain. Je vous aime

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Jour 6 Rancé - Pérouges

En démarrant mon périple, pèlerinage, paix intérieure, je m'étais dit que je donnerais toujours priorité à un logement chez l'habitant. Toute hospitalité demande la participation active des deux parties. C'est pour cela qu'on leur donne le même nom: hôte.

Donc aussitôt ma douche prise, je m'engage dans une bavette avec mon où mes hôtes du jour.

Hier pas eu le temps de la douche. A peine rentré Jean-Pierre me demande: "Vous êtes chrétien", ce à quoi je réponds par l'affirmative. "Venez alors, dit-il, nous allons prier". Sa femme tente bien de le retenir mais il l'entraîne avec nous en m'expliquant que Jésus l'avait désignée comme sa bergère et qu'il devait la suivre.

2 h. plus tard (vous lisez bien) nous sortons grâce à une fatigue simulée et une envie de douche non simulée de prières de pardon, de discussions sur mes ancêtres, de tentative de prières de guérison de ma polyarthrite. Attention tout n'est pas à jeter mais je suis un peu sceptique vis-à-vis de ces personnes qui se croient pourvu d'un don qui leur vient du très haut..

Croyez le ou non, ma sieste à duré longtemps après la douche.

Encore une fois ces personnes sont très gentilles et veulent bien faire mais dans la forme...

Ce matin je quitte donc mes nouveaux frères sous une pluie de bénédictions et me dirige vers Pérouges, 32 kms plus loin.

Il va faire chaud donc je profite du matin pour avancer d'un bon pas.

Avant de quitter la maison, Benaless m'avait fait retourner dans la chambre me disant que j'avais oublié les deux mousquetons qui servent à maintenir ma gourde en place. Ils n'y étaient pas mais pas non plus sur le sac. On verra au premier arrêt.

Justement on s'arrête à l'intermarché et nous deposons Jack à la garderie. Il rouspète bien sûr en disant qu'il ne peut jamais rentrer.

Quand il nous voit revenir avec un pain au noix, un saucisson, un litre de jus et un fromage de chèvre il explose en disant: "Qui va encore porter cela ? J'en ai plein le dos". Je lui réponds gentiment que si il y a bien quelqu'un qui peut en avoir plein le dos c'est moi. "Oui, mais toi tu maigris tandis que moi je gonfle. C'est moi qui aurai bientôt besoin d'un coach sportif."

Nous repartons sous le regard entendu de grizzly et de Françoise pour une fois silencieuse. Commence alors une magnifique partie de chemin avec des étangs à perte de vue malheureusement presque tous privés. Ceux qui me connaissent comprendront que je n'ai pu m'empêcher de m'arrêter maintes fois.

J'ai assisté à l'envol de trois hérons cendrés. J'ai écouté le cri typique du canard siffleur et j'ai admiré le plongeon tout en finesse et en vitesse du martin pêcheur. Mais l'heure tournait et avec mes nombreux arrêts j'avais perdu les fameux Tau qui balisant le chemin. Heureusement Freddy nous a vite trouvé une solution de rechange et nous avons repris la (longue) route.

Et puis à la sortie d'un bois, elles nous sont apparues lointaines mais déjà majestueuses: les Alpes.

Phil n'a pu s'empêcher de prononcer un peu moins sûr de lui:" Et il va falloir traverser cela." Tout le monde s'y est mis.

Françoise : "Tu peux arrêter quand tu veux. Il n'y a pas de honte. L'essentiel est atteint

Bill: Hannibal les a bien traversées avec des éléphants

L'etourdi: des éléphants! Où cela des éléphants ?

Freddy: je peux vous trouver des raccourci

Benaless: Toujours pas vu les mousquetons !

Grizzly: Comment allons nous passer les Alpes ? Nous les traverserons pas après pas.

Ce fût la parole qui remis tout le monde en marche vers cette magnifique cité médiévale de Pérouges où une dame du centre Bethanie viendra nous chercher pour nous héberger.

Les derniers kms ont, je l'avoue, été difficiles et, comme elle me l'avait proposé au téléphone, j'hésitais à la faire venir plus loin.

Là, Françoise a explosé: Espèce de vieux macho orgueilleux, comment veux tu aller au bout de ton périple si tu dépasses déjà tes limites la première semaine? Ce à quoi Grizzly a répondu tous bas:" Elle a raison."

J'ai fléchi et j'ai dit: la prochaine route carrossable que l'on rencontre je sonne.

Ce fut 5 kms plus loin à l'entrée de Pérouges où une dame m'a dit: "Rendez-vous à l'eglise", je leur ai dit "désolé les gars" je n'ai pour seule réponse des regards farouches sauf l'étourdi qui cherchait toujours après les éléphants.

A demain. Je vous aime

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Jour 7 Pérouges - Pérouges

Kcentre Bethanie, j'ai de suite été touché par la gentillesse, la douceur et la foi qui ressortaient de cette petite bonne femme, Louise, responsable de Béthanie.

Béthanie est une famille où chacun, paumé, handicapé, personne en décrochage social peut trouver un toit et où manger en participant à la vie de la famille. Louise insiste bien sur le mot famille car elle les considère tous comme ses enfants. Cette famille vit de production et de ventes diverses: confitures, jus ,...

Je me suis senti vraiment bien dans cette petite communauté. J'ai donc décidé de prendre un jour de repos (merci Françoise) et pour partager avec eux et visiter ce fameux village médiéval de Pérouges. Après un petit déjeuner assorti de longues conversations et une courte visite du village, nous montons dans la voiture pour aller à la messe dans une ville voisine non sans avoir auparavant, après les demandes constantes de Benaless, vérifié que mes mousquetons n'étaient pas dans le chargement de Jack qui soupirait d'aise au fur et à mesure que je le vidais. Première perte.

Au retour de la messe, nous avons dîné avec toute la famille du plus jeune fils de Louise venue en visite Dominicale.

Ensuite direction Pérouges en laissant en paix pour l'après-midi Jack, Freddy de toute façon à plat et Lapin.

Ah oui je ne vous ai pas encore parlé de Lapin ( L'APpareil INcontournable) mon GSM. J'ai failli l'appeler Malin (malheureusement indispensable) mais cela faisait trop diabolique et c'est quand même grâce à lui que je vous tiens au courant de ce voyage.

J'aurais voulu laisser aussi Benaless qui depuis la vérification de la perte de mes mousquetons "se la pète grave" mais les petites voix intérieures sont difficiles à faire taire.

Me voilà donc dans cette cité médiévale comme revenu quelques siècles en arrière.

Cela a meublé mon après-midi et m'a permis de donner à mes jambes leurs exercices quotidiens.

De retour à Béthanie quelques parties de Scrabble avec les adultes, quelques passes de foot ou quelques tours de magie avec les enfants meublent la fin de ma journée avant un délicieux souper.

Un dernier passage à la chapelle et me voilà au lit près à me rapprocher des Alpes.

A demain. Je vous aime.

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 Jour 8 Pérouges - Saint-Sorlin en bugey

Décidément la vie fait souvent bien les choses.

Quand nous nous piquons à une ortie, nous trouvons presque toujours aux alentours un remède naturel: le plantain.

Louise et sa "famille Bethanie" ont été le remède à mon expérience négative du jour précédent.

Voilà le véritable message d'Amour: l'accueil, le partage, la communauté et une prière du cœur et partagée et non pas un gourou récitant des litanies.

Comme cette journée m'a fait du bien! Je reviendrai à Béthanie (en plus j'y étais arrivé le jour de la fête de Marthe, Marie et Lazare, par "hasard"?)

Il fallait bien partir. Ce fut fait avec la promesse d'un retour et après une vérification au frigo commandée par Benaless pour s'assurer que j'avais bien pris fromage et saucisson.

Et voici notre dernière étape de plat. Elle va nous faire traverser l'Ain pour arriver au Rhône.

Les montagnes se rapprochent dangereusement. Le manque d'eau est de plus en plus perceptible. Les agriculteurs ne cessent d'arroser. Les rivières sont dramatiquement basses.

Au milieu de la journée, je profite de l'accueil organisé au château de Chazey sur Ain pour les pèlerins. Une très gentille dame qui a eu le mérite de réveiller l'étourdi a rempli mes gourdes et m'a offert une bouteille supplémentaire sortant du frigo.

Bill et l'étourdi me bassinait pour continuer la causette mais je devais garder du temps pour faire quelques courses avant la montagne.

En effet demain et après demain, il n'y aura pas de possibilité de trouver du ravitaillement. Il faut donc prévoir pour 2 jours. Jack va encore râler. En passant à Lagnieu je m'arrête donc au lidl pour quelques achats que je porte à la main les 2 derniers kms pour préserver Jack et mes épaules.

Mon logement du jour est original. C'est la salle paroissiale pourvue d'une cuisine de quelques tables, de lits pliants et d'une douche. Parfait.

Plus grand désavantage de ce logement: c'est que je suis seul. Pas de rencontres aujourd'hui, pas de partage de vie.

Plus grand avantage maintenant: c'est que je suis seul. Je peux étaler tout mon barda, prendre 2 ou 3 douches, souper et déjeuner à l'heure que je veux. Cela me permettra aussi de répondre à quelques uns de mes mails en retard.

Demain les affaires sérieuses commencent: 1.100 m de dénivelé positif. Allez!

A demain. Je vous aime.

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Jour 9 Saint Sorlin en Bugey - Ordonnaz

Ce matin, j'ai eu droit à un réveil en catastrophe. Benaless n'arrêtait pas de crier: "warning, warning, warning" allumant un gros bouton rouge dans ma tête. L'étourdi lui demande ce qu'elle a crier comme cela. Elle lui répond du tac au tac: "Il est 5 h., si on veut déjeuner avant de partir il est temps de se lever.

Vous n'avez pas vu le bordel qu'il a foutu l'autre ostrogoth là ?"

Je dois avouer que j'avais profité du grand espace de la salle paroissiale pour en mettre partout.

"Bon. On se lève" dis-je.

Quelques dizaines de minutes plus tard Jack était presque plein, j'avais pris ma douche, le lit était refait. Il nous restait à déjeuner. Quand j'ai voulu mettre le reste du déjeuner dans Jack, j'ai bien vu qu'il tirait la tête. "Une fois pour toute,Jack, c'est moi qui te porte. Je suis plus à plaindre que toi.

Nous démarrons donc à 6h30 notre montée qui durera 3 h. Mais quel spectacle autour de nous. En premier lieu nous découvrons le village et sa petite rue principale juste splendide.

Bill me crie: "Un graffiti"

"Non Bill, lui répondis-je, c'est une fresque du xve siècle.

La plupart des maisons sont à photographier. Arrivé à l'église, je suis frappé par une particularité rare que je vous laisse découvrir sur la photo.

Ensuite, plus nous montons plus les paysages deviennent intéressants sur la vallée du Rhône ou sur la chaine des Alpes.

Je suis tellement à la contemplation que j'en oublie de retenir mes pas.

Françoise: "Chou, tu vas trop vite. Tu vas le payer tout à l'heure".

Je l'écoute donc et j'écoute aussi mon corps en m'accordant de plus nombreuses pauses.

Il n'empêche je suis à Ordonnaz à 14 h. après avoir passé le grand golet (830 m), le col de loyon (900 m) et celui du Taporal (960 m) où j'ai eu la chance de voir un arbre remarquable (voir photo) pour passer le col des portes (1071 m).

Commenca alors la descente vers Ordonnaz où, réfugié dans l'église en attendant mon hôte, je rédige mon compte rendu du jour.

A demain. Je vous aime

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Jour 10 Ordonnaz - Brens

Quel délice que de commencer sa journée par une promenade au petit matin dans un village encore tout enrubanné de sommeil!

Le moineaux se querellent pour les miettes d'un BBQ tardif. Les rayons du soleil s'approprient déjà les cheminées des maisons pour envahir tout le reste plus tard dans la journée. Mon esprit est à la chanson.

"Profite, mon cœur, dit Françoise, nous n'avons pas eu souvent de moments pareils. J'étais trop souvent dans l'action et non dans la contemplation."

"Je t'ai toujours aimée comme tu étais mon amour", lui répondis-je.

"Hé les amoureux il est tîmp di roter savé" nous lance Bill.

C'est ce que nous faisons depuis 6h30, moment où nous avons quitté la maison de Coralie et ses deux ados où nous avons été fort bien reçus.

La journée s'annonce chaude et le programme aussi. En effet je n'ai pu trouver un logement que 26 kms plus loin mais avec beaucoup de descentes.

Mais quelle magnifique paysage encore. Entre Ordonnaz et Innimond, je traverse des forêts entrecoupées de vertes prairies où je rencontre mon premier chevreuil. Innimond est un village magique avec un café ultra fleuri que j'ai oublié de prendre en photo et toute une série d'immenses portes en bois qui malheureusement ne sont pas à l'abri de petits esprits (voir photo).

La descente vers Conzieu mérite elle aussi le détour. C'est ce que mes petits-enfants appellent un casse gueule et que nous avons l'habitude de prendre en courant. Ici, interdiction de Jack qui ne veut pas amortir mon éventuelle chute.

Plus loin Bill me crie que nous arrivons à un cul-de-sac avec une énorme clôture gardée par un chien.

Freddy et Lapin se mettent ensemble pour nous remettre sur le droit chemin.

Je dîne ou plutôt déjeune sur une table en pierre naturelle. La préparation de Coralie est délicieuse.

Je me remets en route en veillant à reposer mes épaules toutes les heures en déposant Jack à l'ombre.

Plus tard ,lors d'une de ces haltes je remarque la perte du sac avec mes baskets. Je m'adresse directement à Benalles: "Tu l'avais vu?"

"C'est Jack qui m'a dit de ne rien dire", répondit-elle

"Jack, c'est quoi ce deal ?"

"C'est des vieilles godasses et puis tu ne les mets pas et elles pèsent 360 grammes"

"Jack, tu as de la chance que nous avons besoin de toi sinon c'est TOI qui resterait ici. Compris. Allez en route! Tant pis! Deuxième perte."

La journée continue avec toujours autant de jolies choses à admirer.

A Veyrin vers 14 h. il fait 40 degrés. Je m'arrête sur un banc à l'ombre devant un vieux four à pain et remarque que mes gourdes sont à peu près vides. Je remets mon sac sur mon dos, prends ma gourde et me dis que je m'adresserai à la première personne sur le chemin pour la remplir. 2 km et demi plus loin je n'ai toujours vu personne. En France entre 13 et 15 h. surtout par 40 degrés on ne bouge pas. Je me décide alors à frapper à une porte.

Au moment de frapper Benaless s'écrie: "Qu'as-tu dans la main ?

"Rien puisque je vais frapper"

"Et dans l'autre ?"

"Bin, ma gourde Benalles, Que veux-tu que j'aie ?

Là, la pièce tombe et me fracasse le bas du crâne. Merde, mes bâtons !

Plus question de frapper à la porte. Je prends mon rythme "chasseur alpin" et je remonte (et oui !) les 2 km et demi descendus tantôt. J'arrive au four du village pour voir avec satisfaction que mes bâtons sont toujours là.

Il fallait bien repartir. Ce que j'ai fait en sachant qu'il me restait 6 kms et plus d'eau. Je me suis précipité vers un ancien lavoir où j'ai essayé pour la première fois ma paille filtrante.

Ensuite, comme convenu un km plus loin, j'ai sonné à mon hôte qui est venu me chercher. Je sens que je serai très bien chez eux.

A demain. Je vous aime

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Jour 11 Brens - lac du Bourget

J'ai vraiment passé un très bon moment avec Catherine et Daniel, deux personnes, accueillantes, authentiques et bienveillantes.

Comme ils ont une fille en Belgique, je leur ai suggéré de passer me dire bonjour. Nous nous reverrons peut-être avant car ils comptent terminer en septembre leur propre chemin d'Assise stoppé l'année passée pour cause d'orages sur l'Italie.

De plus, Daniel, fervent randonneur, m'a donné quelques précieux conseils sur l'étape du jour.

Je pars donc au lever du soleil (toujours la canicule) non sans avoir fait travailler Benaless et mon hôte Catherine pour mes bâtons.

Je reste émerveillé constamment par les paysages traversés.

La première montée vers "la Chartreuse" ancien monastère puis château-fort, maintenant propriété d'un particulier, est époustouflante au propre comme au figuré. La route (interdite mais suggérée par Daniel vu l'heure) longe les fortifications du château par la gauche et l'abandonne avec une belle vue de l'autre côté.

Je descends dans la ville de Yenne pour quelques courses (pauvre Jack) puis remonte vers St-Jean le Chevelu (qui a bien fait rire Bill) avant d'attaquer la montée vers le tunnel du col des Dents du Chat, tunnel uniquement réservé aux piétons et aux cyclistes et jouxtant celui des véhicules à moteur.

Au bout du tunnel, 1500 m. plus loin, la vue est splendide sur le lac du bourget, plus grand lac naturel de France. Dommage que les photos ne rendent que très mal l'instant.

La descente est assez difficile mais pas longue. Par contre il fait toujours aussi chaud (37°). J'ai déjà bu plus de 3 litres d'eau et j'attaque ma dernière gourde sur le long chemin macadamisé et sans ombre qui m'emmène au Bourget du Lac où j'ai rendez-vous devant l'église avec Pierre mon logeur du jour.

Je passe près de la plage et ne résiste pas à un second bain de pieds de la journée. Plus loin, une terrasse. J'y cours pour m'offrir la première bière de mon pélé. C'était une allemande légère et blonde (la bière) et elle m'a fait le plus grand bien.

Enfin j'arrive à Bourget et téléphone à Pierre. Il vient me chercher et me conduit chez lui au dessus d'Aix-les-bains où je partage tout l'étage de sa grande maison avec Jack et les autres.

Après quelques discussions sympathiques, je viens vous informer pendant que Catherine prépare le dîner comme on dit ici.

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Jour 12 Chambéry - Montmelian

Encore une magnifique soirée avec des hôtes charmants tout attachés à me faire plaisir. De très belles discussions, enrichissantes et profondes et une jolie surprise au matin puisqu'ils décident de laisser la PAF que tout pèlerin donne à ses accueillants au profit des deux associations pour lesquelles je marche. Geste touchant. Merci Catherine et Pierre. J'en profite pour vous remercier encore une fois pour tous les dons faits et pour tous ceux qui ont oublié de le faire remettre une photo des N° de compte.

Et ma journée ?

Lorsque j'avais programmé mon voyage, je n'étais pas encore sûr de moi point de vue physique. J'avais donc opté pour la solution qui suit la vallée de la Maurienne plutôt que celle qui traverse le massif de la Chartreuse avec quelques fameuses étapes.

Première déception ce matin puisque durant 8 kms, la voie verte (qui n'a de vert que le nom) se faufile entre l'autoroute, le chemin de fer et la nationale. Vous imaginez le bruit. Heureusement dans sa deuxième partie elle nous éloigne de ces calamités sonores pour passer par le sanctuaire de Myans et sa Vierge Noire.

Je visite le sanctuaire et le bar en face, mes gourdes étant vides. J' y repars après une bonne bière... sans mes bâtons (3e x). J'ai donc été bon pour une marche arrière mais de quelques centaines de mètres seulement, Benaless étant au taquet.

Sur la route, je réussi enfin à avoir un logement pour ma nuit en téléphonant à la paroisse.

Je suis à Montmelian 3 h. avant mon rendez vous et comble en partie en vous écrivant.

Je dois vous avouer que je vais relire mon roadbook et éviter au possible des trajets comme ce matin.

Mais je deviens peut-être trop difficile.

A demain. Je vous aime

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Jour 13 Montmelian - Aiguebelle

Quand on arrive trop tôt à un endroit, il faut meubler. Je vous entends me susurrer à l'oreille: "Visite!"

Mi dji vous bé mais quand on déjà fait plus de 20 kms avec Jack sur le dos on n'a plus qu'une envie: le jeter par terre.

Excuse-moi Jack: le poser par terre.

J'ai quand même été faire 2 ou 3 courses au lidl du coin car j'avais bien compris au téléphone que l'on pouvait juste me loger et en cachette de tous pour ne pas avoir d'ennui.

Et puis il y a eu cette rencontre improbable sur deux bancs, devant l'église où j'attendais, de cette femme qui visiblement trainait son ennui et qu'une voix douce bien connue ❤️ m'a enjoigné d'aborder.

"Vous avez besoin de parler, Madame", dis-je simplement. D'abord surprise, je l'entends me répondre doucement: "Pourquoi pas", en prenant place sur le banc à côté du mien.

"Je vous ai trouvé triste, m'excusais-je aussitôt, c'est pourquoi je me suis permis de vous aborder. Commence alors une discussion à bâtons rompus sur la chaleur qui la déprime, sur le sens de la vie, sur les religions, sur la planète et son avenir, sur mes 7 frères et soeurs et sur les neuf siens que sa maman nourrit toujours en faisant un potager de 1/2 hectare. Elle s'échine actuellement à pallier le manque d'eau.

Et puis cette dame repart avec à ses lèvres un sourire et un merci. Je ne sais même pas son nom mais je bénis cet instant de partage.

J'avais rendez-vous entre 17h30 et 18h30. C'est à cette heure que m'est apparu un gentil monsieur béninois qui se présente comme le Curé de la paroisse et qui me dit qu'il a une réunion ce soir, que je serai donc seul. Il m'ouvre la salle de catéchisme. Nous allons chercher un matelas et me voilà installé pour la nuit. Bill n'arrêtait pas de rire. Je lui en demande la raison. "M'étonne pas qu'il était en retard..."

"Bill, ce sont des idées préconçues", lui répondis-je avec un sourire.

J'ai donc mangé seul et me suis installé sur ma paillasse pour la nuit.

Quelques dizaines de minutes plus tard, éclatait un énorme orage qui déversa des trombes d'eau. Intérieurement je souriais et de suite a résonné en moi un alléluia pour cette petite dame qui nourrit ses 10 enfants en travaillant la terre. Françoise a pris la voix d'alto, Grizzly la basse, Phil et Bill celle de ténor et Benaless celle de soprano.

S'endormir sur un alléluia à 4 voix, c'est le pied.

Malgré ce matelas défoncé placé par terre, j'ai passé une excellente nuit et il était 6h15 quand je me suis réveillé. Le temps de déjeuner, de rassembler mon brol, de mettre de l'ordre et je démarrais à 7h15 pour une longue étape.

L'orage de la nuit avait tout changé. Je retrouvais le murmure des ruisseaux. Je sentais l'humus humide des sous-bois rafraîchis. Je n'étouffais plus en marchant. De plus, le parcours de cette matinée était varié et remarquable. Les vues sur les montagnes sont chacunes aussi belles.

28 kms plus loin, je regarde plus souvent mes pieds échauffês que les montagnes. La chaleur est revenue. Chaque fontaine est l'occasion d'un arrêt rafraîchissement ou/et bain de pieds.

J'arrive à Aiguebelle à 14h30 et j'attends mes hôtes au point de rendez-vous.

Grizzly pique un petit roupillon tandis que Benaless tape un oeil sur Jack et les bâtons.

Françoise me glisse à l'oreile: "Qu'est ce qu'on est bien!"

A demain. Je vous aime

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Jour 14 Aiguebelle - Saint-Jean de Maurienne

Que de jolis partages encore hier soir avec Bernadette et Jean-Luc, mes hôtes du jour! Autour du chemin, de la poésie, de l'aquarelle ou de cette magnifique région que je traverse.

Merci à eux pour cet accueil chaleureux. De plus, eux aussi, ont décidé de laisser leur "paye" au profit des associations que je soutiens.

En démarrant ma journée, je suis devant un problème nouveau. Je n'ai trouvé aucun logement pour mon étape suivante. En réservant pour lundi soir à St-Jean-de-Maurienne, je demande si elle peut éventuellement me recevoir ce dimanche et elle accepte.

Je me lance donc à 7 h. pour une étape de 40 kms.

Dès la sortie d'Aiguebelle, je remarque que le chemin nous fait suivre majoritairement une nationale. Autant de kms sur le bitume, je ne résisterai pas.

Françoise me dit:" Tu ne m'as pas écouté. Tu n'en fais qu'à ta tête."

Grizzly me propose:" Et si tu levais le pouce ?"

Bill enchaîne: "Oh oui ça peut être cool"

Je tente l'expérience et 3 min. plus tard, une voiture s'arrête et m'emmène 14 kms plus loin. Voilà une distance plus raisonnable même si la chaleur est déjà de retour vers 10 h. C'est le moment où je m'arrête sur une terrasse pour boire un bon perrier menthe. La dame en plus remplit mes gourdes en y ajoutant des glacons.

En partant, j'entends les cloches de l'église sonner l'appel à la messe et je m'y rends en bon pélerin.

Je dîne à la sortie du village de Les Planches où se déroulent des courses cyclistes.

Je repars de bonne humeur car on quitte enfin le bitume et la cigale vient nous inventer une chanson de son cru. Plus loin je me retrouve face à l'"Aura" une forme géométrique faite de +/- 40000 morceaux d'aluminium autant que le nombre d'habitants de la Maurienne.

Juste avant St-Jean, un lac lance à mes pieds une invitation que je ne peux leur refuser. Mon Dieu que c'est bon !

Arrivé à St-Jean à 15 h. il me reste à appeler mon hôte du soir pour venir me chercher.

Je visite quand même ce magnifique édifice avec des stalles en bois de toute beauté.

A demain. Je vous aime

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 Jour 16 St Michel de Mauriennne - Modane

Je suis émerveillé tous les jours par la qualité de contact que je peux avoir avec mes hôtes du soir. Comme si l'urgence du départ obligeait à aller directement à l'essentiel. Ce fut encore une superbe soirée avec Sylvie et Pierre. De plus, non seulement ils n'ont pas voulu que je leur donne ma participation mais ce sont eux qui m'ont donné une enveloppe pour l'opération. Géniaux !

Il me fallait sortir de St-Michel ce matin et comme d'habitude par la nationale.

Heureusement pas pour longtemps.

Enfin "heureusement", c'est beaucoup dire. J'espérais un petit jour peinard (17 kms). Tu parles. Pour éviter la vallée il faut... "monter"

"Bravo Bill, toi, tu suis."

 C'est ce que j'ai fait, monter, descendre, re-monter, re-descendre...

Mon point le plus haut a été un col à 1514 m. alors que nous partions de 698 m. Mais quelle belle étape!

J'ai grimpé des chemins qui serpentaient entre pierres et racines. J'ai traversé des torrents en y laissant parfois tremper mes pieds. J'ai admiré les toits faits de lourdes pierres plates destinées à soutenir le poids de la neige. J'ai photographié une vieille croix dont le bois part en poussières mais où des fidèles déposent des pierres à sa base comme pour l'empêcher de tomber ou de s'envoler. Je me suis aussi permis quelques pauses "repose-épaules" durant lesquelles Benaless était au taquet et Jack piquait un petit roupillon.

Et j'étais vers 13h30 à Modane où je devais prendre possession de mon appartement. En effet depuis quelques jours, j'échange des messages avec Jean-Philippe, un de mes anciens élèves et ami FB car il possède un appart à Modane et se propose de me le laisser le temps qu'il me faudra pour me reposer avant l'Itale. J'ai bien sûr accepté avec joie et je tiens à remercier devant tous Jean-Philippe et sa famille pour ce joli geste.

Il vient à point car j'éprouve le besoin d'un peu de repos.

A demain. Je vous aime.

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 Jour 17 Modane-Modane

C'est durant le jour de repos que l'on se repose le moins.

J'ai trié mon sac sous l'œil attentif de Benaless. J'ai fait les courses pour la journée et en prévision des étapes de montagne sans possibilité de magasin (sans le dire à Jack). J'ai donné des coups de fil pour réserver les prochains hébergements. Je me suis promené en ville pour remplir ma crédentiale et remplacer les lunettes sur lesquelles je m'étais assis (mais oui !) avec les reproches d'une petite voix intérieure bien connue. Je me suis permis une pizza au restaurant à midi sous l'œil envieux de Grizzly. J'ai profité de la WiFi pour contacter mes enfants. J'ai mangé plein de choses interdites mais qui m'ont fait du bien: éclair, crème Mont-Blanc (désolé Sarah Dardenne). J'ai soigné les petits bobos dont je ne vous ai pas parlé pour ne pas vous inquiéter.

"Des bobos en Haute Maurienne, je pensais qu'il n'y en avait qu'à Paris!"

"L'étourdi, tais-toi!" hurle Phil.

J'ai remplacé ma banane qui, vu ma perte de poids, menaçait à chaque instant de se faire la malle avec mes sous, mes cartes et mes papiers d'identité. J'ai voulu visiter la ville mais je n'ai à vous donner comme photo que le fort Replaton vu d'en bas et mon orteil soigné vu d'en haut. Je suis même retourné en enfance en regardant un épisode de "La petite maison dans la prairie."

J'ai fait de la musculation le matin et du streching l'après-midi .

Et surtout je tourne en rond. Vous allez rire. Le chemin m'appelle. Il me manque. Je suis pressé d'être demain matin pour m'élancer à nouveau vers Assise.

A demain donc. Je vous aime.

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Jour 18 Modane- Refuge du Suffet

4h30 réveillé. Tout de suite branle-bas de combat dans ma tête.

Bill: Rendors-toi une heure!

Benaless: Ah non il faut tout retrouver avant de partir.

Françoise: oui et remettre en ordre comme cela l'était en arrivant.

Grizzly: c'est la moindre des choses.

L'étourdi: Où ça des roses.

Ok. On se tait. Je me lève.

Un heure et demie plus tard l'appartement était nickel. J'avais déjeuné. Jack était chargé. Je fermais la porte, coupais le courant et remettais les clés à leur place.

6h15 je traversais Modane en longueur pour m'arrêter à une boulangerie où j'ai siroté un café et dégusté un excellent croissant en faisant mon achat de pain quotidien.

Et puis ? Le bonheur! 6 longues heures de marche avec des dénivelés pas possibles mais quelle chance de vivre cela!

J'ai assisté, ébahi, au lever du soleil sur la cîme d'une montagne encore toute enrubannée d'un léger nuage sensuellement posé sur elle. J'ai traversé des villages où chaque maison aurait pu faire l'objet d'une photo. J'ai trempé mes pieds échauffés dans le lit de l'Arc en admirant les kerns de quelques enfants passés avant.

J'ai gravi une pente où tu es obligé d'être toujours sur la pointe des pieds et où tu te demandes si tes mollets ne vont pas claquer, tout cela pour découvrir une église du 11e siècle qui a gardé son caractère et son invitation à la méditation.

Et enfin j'arrive dans un refuge, accueilli comme un fils où on est prêt à me conduire quelques kms plus loin pour que je puisse vous envoyer ma petite bafouille.

Que la vie est belle !

Quand dans d'autres coins de France et de la planète la nature se rebelle contre ce que nous lui faisons subir, il est temps de réagir pour que nos petits-enfants puissent vivre une telle immersion dans cette si belle création.

Je vous laisse à cette réflexion.

A demain. Je vous aime

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Jour 19 Refuge du Suffet - Grande croix

Permettez-moi d'abord de revenir sur la journée d'hier. Arrivé très tôt dans ce petit coin de paradis, j'essaye de me montrer utile. Je participe donc à la cueillette des groseilles sauvages, à leur tri et à leur nettoyage. Ensuite Florence, une des aidantes du patron Louis, nous invite à mettre les pieds dans le ruisseau tout proche à un endroit aménagé pour nager. A 12° non merci. Juste les pieds. Je prends possession de ma chambre: un dortoir de 8 personnes pour moi tout seul. Jack choisit son lit qu'il partagera avec Freddy et Lapin, les autres étant obligés de rester dans les limbes de mon cerveau.

Au souper, la table est mise pour tous. Cela me permet de faire connaissance avec une famille de Francfort et trois amis français qui se font un séjour en montagne. Mon périple les intrigue tous surtout que deux des français sont médecins et se posent des questions quant à ma réussite.

Le repas est absolument succulent. Louis est un vrai chef. Voyez plutôt: velouté aux courgettes, poulet à la basquaise accompagné d'une salle chaude de bettes entières et de riz cuit dans l'huile, salade, clafoutis aux framboises.

Vraiment une adresse à retenir. Je vous la conseille, si vous aimez la montagne, la simplicité et la bonne bouffe.

J'ai mis plus de temps à m'endormir.

Je retrouve nos amis français au petit-déjeuner et après un au revoir et un merci appuyés à nos hôtes, je démarre.

Un des français me crie: "Tu vas voir. C'est beau là haut"

Au départ, je n'ai retenu que la première partie de la phrase: C'est beau.

Très vite j'ai resongé à la seconde partie: là haut.

En effet 2 h. plus tard, je montais encore les jambes lourdes mais le cœur de plus en plus léger parce que le spectacle qu s'est offert à moi toute la matinée fut de toute beauté. J'aurais pu prendre 10x plus de photos. Les alpages au sommet sont absolument magnifiques. Plusieurs fois Freddy à du rectifier notre parcours parce que je ne suivais pas les balises trop occupé à admirer le paysage. Françoise et Grizzly se partageaient les places derrière mes iris pour ne rien manquer du spectacle.

"Je suis contente de vivre cela avec toi", dit-elle tout bas.

"Moi, je resterais bien ici", reprit Grizzly

"Ça ne m'étonne pas, dit Phil, déjà à Rochehaut, on a du mal à te récupérer"

Arrivé au lac du Mont Cenis, je suis surpris par son niveau extrêmement bas. C'est malheureusement le cas de tous les lacs français. La plupart des torrents qui l'alimentation sont à sec.

J'ai quand même trouvé un torrent où tremper mes pieds tout en dînant avant de descendre à Grand-Croix où le seul logement trouvé est un hôtel.

 

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Jour 20 Grand-croix - Suza

Une nuit à l'hôtel ne permet malheureusement pas les merveilleux partages des soirées chez l'habitant.

Par contre elle permet un repos du corps grâce entre autre à son immersion dans l'eau bien chaude d'une baignoire. Grâce aussi à l'obligation d'attendre 7h30 pour déjeuner. Heureusement on annonce moins chaud pour cette journée mais aussi des risques d'orages.

Mais la grande nouvelle de ce matin est: "Bongiorno Italia".

En effet 200 m. après l'hôtel, je passe devant l'ancien poste de douane pour descendre vers Suza. 1671 m. de dénivelé négatif, de quoi chauffer les cuisses et le bout des orteils.

Comme je n'ai pas encore la foi jusqu'à transporter les montagnes, je suis obligé de les monter et les descendre.

Nous rejoignons dans cette descente la Via Francigena qui part de Canterbury pour aller jusqu'à Rome.

"Mais pourquoi marches tu si vite ?", s'enquiert Françoise

"Il a un train à prendre", rigole Bill

"Qui va-t-on pendre ?", demande l'étourdi

"Toi si tu continues...", s'énerve pour une fois Grizzly

En fait je me rends compte aussi que je ne sais pas marcher doucement. Et pourtant une fois encore le parcours est sublime. Alors je décide de multiplier les pauses repose-épaules pour les transformer aussi en pauses photos.

Je traverse quelques villages typiques italiens très jolis pour arriver à Susa au couvent de St-François reconverti en hôtel. Seconde nuit à l'hôtel. Cela commence à me donner un problème de conscience. Comment revendiquer la simplicité si je me permets de telles extravagances ? J'ai quand même eu l'explication de toutes ces réservations. En Italie le WE du 15 août est le plus demandé dans les gîtes et les BB.

Je prends la peine, malgré une douleur inquiétante à la cuisse, de faire le tour de cette belle ville pour vous en donner quelques photos.

A demain. Je vous aime.

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Jour 21 Susa - Trana

Depuis quelques jours, je me creuse les méninges à propos de mon programme à venir.

Je pars d'une obligation: je dois être le 26 au soir à Neive où je rencontre ma fille, Marie, et sa famille qui m'apporte mon médicament.

En effet le médicament qui soigne ma polyarthrite est une piqûre qui doit rester à température frigo jusqu'à son admission. Or il me reste 3 jours et 126 kms pour Neive. Il me manquera 2 jours: les 2 jours de repos pris plus tôt. Si je veux, comme promis écouter mon corps, je vais devoir avancer autrement qu'à pied.

Dans les étapes qui suivent une chose me paraît incontournable: la visite de l'abbatia di San Michel (www.sacradisanmichele.com).Je décide donc de m'y rendre en priorité sautant ainsi une étape en prenant le train.

J'avais auparavant subit les foudres de Benalless qui avait repéré mes lunettes sous le lit et mes bâtons plantés dans la poubelle.

Me voici donc après 20 min. de train et plus de 2 h. de montée devant cette fameuse abbatiale Saint-Michel.

Après toutes les années passées au Collège Saint-Michel et après l'énorme cadeau fait au profit de mon périple, je me devais de la visiter pour vous en faire profiter.

Je me suis ainsi rappelé que cet ouvrage fait partie des 7 grands édifices construits en ligne droite vers Jérusalem (voir photo). Comme les autres, édifié à même la roche, il est imposant. Différents tableaux ou sculptures font la part belle à notre Archange.

En redescendant par le chemin qui doit me mener à Trana, la douleur à ma cuisse revient pour s'intensifier jusqu'à l'arrivée. Par contre le chemin est magnifique encore une fois.

Jack fait connaissance un cours instant avec la pluie mais je m'empresse de le recouvrir de sa belle bâche jaune. Juste le temps que la pluie s'arrête...

En fin de parcours, je suis une rivière où je me fais un plaisir de laisser traîner mes pieds et j'arrive à 15h30 devant l'église où j'ai rendez-vous avec mon accueillant à ... 18 h.

Un pélerin apprend la patience.

J'en profite pour vous écrire et masser ma cuisse.

A demain. Je vous aime

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Jour 22 Trana-None

Je commence ma petite bafouille par une constatation. C'en est fini des discussions philosophiques et existentielles avec mes hôtes. La barrière de la langue est là et je suis déjà content de savoir réserver un endroit où dormir.

Cela n'empêche pas l'accueil d'être extraordinaire. Ainsi la paroisse de Trana met à notre disposition un étage entier avec 4 lits, une cuisine avec quelques nourritures dans le frigo, une salle de bain avec douche, des essuies, du savon et un cadeau pour chaque pèlerin. Tout cela au prix pèlerins, c'est à dire que l'on met ce que l'on veut dans la caisse. Il faut bien sûr être honnête et donner en fonction du service.

A peine parti de Trana en direction de None, je vérifie régulièrement que ma cuisse tient le coup. J'avais pris hier après-midi l'avis de mon vieux pote Pascal, médecin et sportif accompli et de mon ami Michel, kiné et lui aussi sportif qui m'avaient donné leurs avis sur la manière de "contrer" cette douleur sans doute due à une contracture.

Ma cuisse a tenu mais je sens que un peu de repos serait bénéfique. Inutile de vous dire que c'est aussi l'avis de Grizzly et de Françoise dont je tairai les commentaires. Bill, lui trouve que je devrais faire du cloche pied.L'étourdi quant à lui se demande pouquoi mettre des cloches à mes pieds.Je décide donc à la fin de mon étape de téléphoner à Marie et de lui dire que je ne bouge plus d'ici demain et que je l'attend à None, finale de cette étape de 22 kms.

Les paysages ne sont plus aussi beau. Nous traversons la plaine du Pô près de Turin.

J'ai quand même eu la chance de rencontrer à quelques mètres de moi un écureuil et deux chevreuils qui,apeurés se sont enfuis en quelques gracieux bonds.

Arrivé à None, dans un petit hôtel qui fait une réduction aux pèlerins je constate la perte ou l'oubli des savates que j'avais acheté en lieu et place de mes baskets perdus. J'ai pensé à ce moment à donner son C4 à Benaless mais je n'ai personne d'autre sous la main.

A demain. Je vous aime

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Jour 23 None - Neive

Si l'un des buts de cette "promenade" de deux mois et demi est de retrouver un sens à ma vie après l'acceptation du retrait de mon grand amour dans une part de mon cerveau et de mon coeur, la visite d'une partie de ma tribu aujourd'hui me rappelle que de toute façon ma vie a du sens. Ils sont tous ma raison de vivre et mon envie de voir tout le positif de notre existence. Quoi de plus beau que l'amour? C'est le message de la plupart des philosophies et des religions. En tout cas, c'est l'essentiel de la mienne.

En les attendant ce matin, je mesurais la chance d'être à la tête d'une telle tribu.

Ils me conduisent aujourd'hui jusqu'à ma prochaine étape, Neive. Une journée de repos devrait être suffisante pour ma cuisse récalcitrante.

L'agriturisme Ercol ana n'est pas une adresse au hasard. C'est une recommandation de mon ami François qui va s'y reposer de temps en temps

et en profite pour faire le plein de bon vin et d'amitié.

Nous y avons été reçu comme des rois. Les chambres sont super belles et ont l'air confortables.Renato et son équipe font tout pour nous être agréables. Demain nous serons au moins 4 à reprendre le chemin vers une autre étape. En attendant nous profitons des installations et de la gentillesse de nos hôtes qui, pour notre chance, parlent un peu français.

Je dois dire que cette visite booste mon moral qui en prenait un coup avec cette douleur à la cuisse et les paysages monotones de la plaine du Po.

Ici, nous sommes dans un environnement de collines habillées de vignes. Notre hôte propose d'ailleurs ses propres productions. Sans excès bien sûr. Nous devons marcher demain.

En terminant, à vous qui me lisez sur Facebook, je vous remercie de recommander ma page. Cela permettra peut-être à d'autres de participer à ma récolte de fond pour les deux associations que je soutiens.

A demain. Je vous aime.

 

Jour 24 Neive-Montabone

Quels plaisirs! D'abord de partager mon aventure avec une partie de ma tribu.

Ensuite d'être reçu de telle manière dans un endroit charmant. Car Graziella et Renato avaient vraiment mis les petits plats dans les grands pour nous être agréables. Nous les quittons avec regrets pour prendre tous ensemble la route de Stefano Belbo.

Plus question de méditation ni discussions intérieures. Tout l'espace sonore est pris par les filles que je suis vraiment content d'avoir à mes côtés pour marcher. Françoise me glisse à l'oreille qu'elle aussi est heureuse. Nous montons à travers les vignes pendant une heure et c'est à ce moment que Fred et Violette redescendent chercher l'auto où s'est avachi avec complaisance notre ami Jack. Ils sont accompagnés de Musso, un chien qui avait décidé de nous suivre et qui les suivra encore jusqu'à l'auto avant que des personnes decident de s'en occuper.

Les 16 derniers kms que nous avions à faire ce jour se passent dans ces collines où s'alignent à l'infini vignes et noisetiers.

Nous arrivons sur le temps de midi à Stefano Belbo ou Fred et Violette nous attendent déjà pour nous mener à Montabone où nous avons trouvé un agriturismo pour nous loger. Comme ce village est classé pour sa vue et son caractère nous le visitons avant de profiter des bienfaits de cet établissement. Malheureusement le temps maussade ne nous permet pas de profiter au maximum de cette vue extraordinaire qui donne jusqu'au Alpes.

Nous allons terminer cette journée avec la pluie mais bien à l'abri à jouer à des jeux de société.

A demain. Je vous aime

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Jour 25 Montabone-Morbello

Dans la vie il peut nous arriver des jours de malchance ou des jours de chance.

Ce matin cela aurait clairement pu être un jour de malchance. Des orages faisaient tomber depuis 5h30 des litres d'eau qui pour être bénéfiques à notre pachamama, notre sœur la terre comme eut dit St-François auraient pu tomber moins dru.

Il n'empêche que notre désir de marcher à nouveau ensemble s'est retrouvé "refroidi" surtout qu'aucun de mes merveilleux visiteurs n'avaient prévu de k-way.

Ce fut pourtant un jour de chance. Car nous avons décidé de faire cette étape en voiture et si nous n'avons,rien vu des paysages, étant donné les nuages qui bouchaient tout l'horizon, nous sommes arrivés un peu avant midi à Morbello où un employé de la mairie nous a accompagné à l'endroit de ma nuit.

C'est un énorme bâtiment anciennement occupé par des personnes handicapées qui a été reconverti en centre d'hospitalité.

En attendant l'heure du repas, nous avons rejoué (au sec) à un jeu de société.

C'est en sortant du restaurant tout proche, après un excellent repas typiquement italien que nous avons posé (sous le soleil) pour une photo d'au-revoir. Ils repartaient pour un long voyage vers la Belgique que je leur souhaite sans encombres.

Françoise a versé sa petite larme mais c'était une larme de joie en voyant l'amour que nous nous distribuons le plus possible. J'ai passé le reste de l'après-midi à re-programmer mes étapes en tentant de les faire moins longues et moins harassantes suivant le conseil local: "Chi va piano va sano e lontano !"

Jack et Freddy ont apprécié la journée de repos; quant à Lapin, il est bien précieux pour vous informer er gérer les prises de vue.

J25 01 J25 02

Jour 26 Morbello-Tiglietto

Après-midi farniente depuis le départ de ma petite famille. Départ difficile pour Françoise et Grizzly mais apprécié par Bill et l'étourdi qui trouvent que l'aînée est une vraie Duracel, la moyenne une anti-sociale à la téléphonite aiguë et la plus jeune un peu bruyante.

Toujours est il que je les remercie du fond du cœur de leur long déplacement pour venir accompagner le vieux papy sur son chemin.

En début de soirée, j'ai le plaisir de rencontrer deux pèlerins qui vont dormir dans la villa. Ils viennent de Valence en France et passe 15 jours sur le chemin. Ensemble, une fois installés, nous avons pris un verre et fait connaissance. Ils s'appelent Stéphanie et Hervé, sont très sympathiques et nous décidons de faire route ensemble le lendemain vers Tiglietto.

Déjeuner vers 7h30 puisque la température a baissé. Et puis en route.

Encore une fois quel magnifique spectacle s'offre à nos yeux8 Par des chemins caillouteux ou des sentiers forestiers? notre itinéraire nous emmène à la rencontre de paysages exceptionnels, de villages typiques, d'abbayes ou de gorges profondes où l'on se croirait dans un bon western. Avec des moments hors du temps comme cette prière improvisée sur un rocher au milieu d'un ruisseau.

La journée avance et au fur et à mesure de cette avancée nous nous rendons compte que? finalement? nous aurons rarement fait du plat. Les jambes, elles, s'en plaignent et lorsque nous arrivons chez notre hôte du soir le verdict est là: 26 kms, 1050 m. de dénivelé + et 1100 m. de dénivelé -.

Je me réjouis de passer encore la soirée avec eux ainsi que la matinée de demain. En effet, ils reprennent le train vers Valence dans l'après-midi.

A noter: 5 min de pluie qui nous aura permis de sortir nos capes et d'habiller Jack de jaune.

A demain. Je vous aime

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Jour 27 Tiglietto-Capanne di Marcolaro

Mon Dieu, quelle journée !

Tout commence très bien par un petit déjeuner sympa avec notre hôte et un départ fort matinal pour que mes amis Stéphanie et Hervé puissent arriver à temps à Campo ligure et prendre leur bus vers Turin avant de rentrer chez eux.

Toute la matinée se passe dans un décor splendide où les collines succèdent aux collines, où nous sommes seuls face à cette immensité verte, sur des chemins et des sentiers perdus, sur des pentes abruptes ou des coteaux arborés.

Pas besoin de conversation. Nous sommes tout à la contemplation. Francoise me glisse même plusieurs fois à l'oreille: "Je suis heureuse de vivre cela avec toi".

Sur un des pics du haut duquel le paysage est superbe à 360 degré et d'où l'on aperçoit au loin des massifs enneigés, nous sentons le besoin d'une prière.

Quant on est ainsi dans la contemplation on ne se rend pas compte de la difficulté de l'étape. Pourtant le dénivelé était encore assez élevé et nous étions contents après 14 kms d'arriver à Campo Ligure, finale du chemin de cette année de mes amis.

Quant à moi, il me reste 3 kms avant mon B&B car je n'ai rien trouvé en ville.

Nous prenons le temps de partager ensemble un dernier repas, une glace et un café avant de nous dire Au revoir et de reprendre chacun notre route.

Commencent alors les difficultés . Mon B&B situé à Capanne di Marcolaro est sur le chemin. Il suffit, me dis-je, d'être attentif et je le trouverai. Pour sortir de Campo Ligure, il faut se farcir une route avec des pentes de 12 à 18 %.. Courage Philippe, me dis-je, ce n'est que pour 3 kms. 2 heures après suite à 10 kms de montée je n'ai toujours pas vu mon hôtel et pourtant je suis encore à Capanne. Je me décide à leur téléphoner. Ils me disent que je suis trop loin (de 7kms) et de revenir. Je leur explique que je me sens plus la force de retourner. Ils m'envoyent alors dans un autre B&B un peu au-delà d'où je suis.

Je m'y rends pour m'entendre dire qu'il n'y a plus de place, de continuer 5 kms pour en trouver un autre.

J'explique que je viens de faire 2 étapes exténuante et que je veux bien dormir dans du foin. La dame, gentille, m'emmène dans le jardin où se trouve une tente pour ses petits-enfants. Elle me propose d'y passer la nuit. C'est de là que je vous dis... A demain. Je vous aime.

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Jour 28 Capanne di Marcolaro-Passo d'ella Boschetta

J'ai passé une bonne nuit dans ma petite tente queschua après avoir partagé le repas avec Emmanuella et Luca. Cela m'a ramené 50 ans en arrière lors de mes camps scouts ou compagnons.

Après un petit déjeuner léger, je prends congé de mes hôtes et me lance dans une courte étape (12 kms).

Je me rends vite compte qu'il n'y aura plus en Ligure d'étape sans dénivelé. Ce n'est qu'une suite de collines à monter et descendre toute la journée.

Le fait de se retrouver seul redonne la parole à mes amis.

L'étourdi: On arrive quand et où.

Grizzly: Dans un mois et à Assise

Bill: Que va-t-on faire à Assise ?

Françoise: On va voir St-François. Il le chante toute la journée.

Bill: Y avait pas un St-François à Knokke le Zoute ? C'était moins long et plus plat.

Benaless: Taisez-vous un peu. Vous le perturbez. Il va encore se tromper.

Et les paysages se succédent tous aussi beaux et sauvages que les derniers jours. J'ai vu plusieurs lacs remplis où complètement à sec. J'ai passé plusieurs cols. J'ai aperçu de loin Gênes et son golfe.

"Qui a une golf ?"

" L'étourdi. Tais-toi "

Et je suis arrivé à 13h45 à l'endroit où j'ai rendez vous à 16 h. J'ai commencé à vous écrire et puis je me suis dit que c'était trop bête d'attendre. Je me suis donc mis en route pour la paroisse de Pietralavezzara où un dortoir de 20 personnes m'attend moi tout seul. Encore 4 kms. Je devrais apprendre la patience. Mais bon, l'accueil d'Emilio et d'une partie du quartier était à la hauteur de l'effort fourni. Quand je lui ai dit que je n'avais plus rien à manger et que nous étions dimanche, la table s'est ornée de pâtes, de figues, de tomates...

Bref la multiplication des pains.

Il me restera à cuisiner tout cela.

A demain. Je vous aime

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Jour 29 Passo della Bochetta - Passo del Giovi

Je suis admiratif de tout ce qui est mis en œuvre par certaines paroisses ou associations pour accueillir les pèlerins. Hier j'ai été nourri. Aujourd'hui mon hôte Fabrizzio n'a pas hésité à quitter son boulot pour venir m'ouvrir le bâtiment où je vais passer l'après-midi et la nuit. Dans les deux cas je suis seul dans de grands dortoirs et logé par l'association Alta Via.

Etant donné les efforts demandés à mon corps depuis quelques jours et suite à l'intervention musclée de mon ange gardien, Phil le têtu, comme elle l'appelle, a décidé de faire une courte étape de 8 kms afin de profiter de la vue sur le golfe de Genova (photos) et surtout de reposer ses muscles et articulations.

Cette "promenade" n'en était pas moins très jolie et m'a mené au village de Giovi où ce midi je vais me permettre le restaurant. C'est vrai que ces temps-ci j'ai délaissé mon alimentation et un bon repas me fera du bien. La bière, le tiramisu et le capucino feront surtout du bien à mon moral qui, soyez rassurés, reste au zénith.

Après ce bon repas, permettez moi quelques réflexions.

Je suis tout d'abord surpris par ma résistance physique car même si je m'étais bien préparé (merci à Sarah, à mon médecin traitant et à ma rhumatologue qui ne m'ont pas interdit ce périple mais ont mis des conditions), ce n'est pas une évidence de parcourir tous ces kms à 65 ans et avec une polyarthrite.

Je suis émerveillé (mais je vous le dis tous les jours) par cette nature extraordinaire que je côtoye sur les chemins.

Je vous remercie pour votre soutien qui me va droit au cœur et encore plus s'il est accompagné d'un "cadeau" aux deux associations pour lesquelles je marche.

Et je suis en joie profonde de voir la solidarité humaine autour de ce chemin. Cela me rassure sur mon prochain dans ces temps où nous traversons une période difficile. L'Amour a encore un bel avenir.

A propos d'amour, je vous dis ... je vous aime. A demain.

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Jour 30 Passo di Giovi - Colle di Croce

Petit souper léger avant de passer la nuit avec Jack et 12 lits vides.

Au matin, plein d'entrain, je démarre vers 7h et prend la première... montée.

Une douce voix me dit gentiment: "Tu ne mettrais pas ton chapeau Phil ? Le soleil est déjà présent."

"Oui merci Benaless... M... mon chapeau "

Je fais directement demi tour. Heureusement cette fois je ne devais pas mettre la clé dans une boîte aux lettres mais la cacher quelque part.

Je récupère donc mon chapeau et.... mes bâtons.

"Merci Benaless, dis-je, mais j'ai été surpris par ton timbre gentil"

"Depuis le début de cette aventure tu me fais passer pour l'em... de service. Je voulais te montrer que je suis quand même utile", me dit-elle.

"Tu as raison. J'en tiendrai compte dorénavant", terminais je.

Et me voilà donc chapeau sur la tête et bâtons en main sur les chemins du col de Croce. Qui dit col dit montée. Et cela monte bien. Tandis que je m'élève vers le sanctuaire ND de la Victoire, le soleil caresse de ses premiers rayons les villages encore assoupis.

Après le sanctuaire nous empruntons des "chemins de biquette" comme aurait dit Stéphanie pour grimper encore et encore et puis suivre une ligne de crête qui donne de merveilleuses vues d'un côté sur la Méditerranée, Gênes et sa région et de l'autre sur les montagnes que je devrai emprunter dans les jours suivants.

Grizzly me demande à brûle pourpoint

"On ne va plus à Assise?"

"Mais oui, pourquoi ?"

"Tu ne chantes plus ta chanson."

"Ah c'est vrai. J'ai été en contact hier soir avec un ami musicien qui avait un problème avec le début de mes couplets. Comme ils ne me plaisaient pas non plus, je lui ai demandé si il pouvait y travailler. Il m'a répondu qu'il attendait que je lui demande. J'attends donc sa version pour ne pas prendre de mauvaises habitudes "

"Cela ne fera pas de mal de changer de disque."ajoute Françoise.

"Merci", dis je un sourire au coin des lèvres.

En attendant je suis redescendu dans un petit village au doux nom de crocheta d'orero d'où démarre la dernière montée vers le col. Nous étions à 463 m. Quelques kms plus loin, quelques heures plus tard et à l'altitude 775 m, j'arrivais ébahi au sommet pour vous envoyer des photos de la ville de Genova et de son Pont reconstruit -En 2018 le pont Morandi s'était effondré et avait provoqué la mort de 48 personnes- avec en arrière plan la méditerranée.

Il me restait quelques centaines de mètres à parcourir pour rejoindre le B&B

où je logerai ce soir et d'où je vous envoie ces doux mots.

A demain. Je vous aime

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Jour 31 Colle di Creto-Passo della Scoffera

Pour faire plaisir à Benaless, dans la chambre à deux lits que j'occupais hier dans un B&B tenu par deux gentilles petites vieilles qui parlaient un peu français, j'avais disposé mes affaires sur le second lit afin de ne rien oublier.

Après le petit déjeuner, pris en tête à tête avec Nina, je n'avais donc plus qu'à tout remettre aux"mains" de Jack.

Ce fut fait en un clin d'œil et en route vers Scoffera et son passage. Les "passo" sont donc des endroits d'où l'on peut passer d'une colline à l'autre en leur point de jonction.

Inutile de rappeler que mon menu du jour est de descendre et de monter. Dans la première montée, j'ai fait une rencontre sympathique. Je suis tombé nez à nez (à 15 m. quand même) avec un chevreuil. Il ne m'avait pas vu. Ce fut ma chance. Je décidai de faire la statue et de ne plus bouger. Quand il m'a aperçu, il ne s'est pas enfui. J'ai planté mes yeux dans les siens et j'ai profité de l'instant présent. Les secondes passent vite dans ce cas là. Je me suis dit qu'il serait agréable à tous mes lecteurs de profiter aussi du moment. Tout en gardant mes yeux dans les siens dans un mouvement très lent, j'ai fait passer mon bâton droit dans ma main gauche avec l'autre. Ensuite toujours aussi lentement j'ai glissé ma main dans ma poche afin d'agripper Lapin (mon gsm) et de le sortir pour faire une prise de vue. La tension était insoutenable, l'attention était palpable. Une goutte de sueur perlait sur mon front. D'un coin de l'œil, je surveillais le cervidé et de l'autre j'observe Lapin pour trouver le bouton rouge marqué app. photo. Je m'apprêtais tel Lucky l'une à dégainer plus vite que mon ombre quand le cri d'alerte d'un geai a fait déguerpir le chevreuil. En trois bonds, il était loin et son cri rauque semblait dire: "Barrez vous les gars, il y a un gars de chez Disney qui veut faire un remake de Bambi."

Voilà pourquoi vous n'aurez pas de photo de chevreuil. Par contre des paysages, j'en ai vu pas mal et des beaux. Je suis monté à 1000 m. d'altitude et sur une ligne de crête où il valait mieux regarder à ses pieds, j'ai pris les dernières photos de la mer avant de bifurquer vers l'intérieur du pays pour rester sur les Aennins. La descente vers le passo de scoffera fera aussi partie de mes souvenirs. Je me suis d'abord trompé (dans ce cas là souvent entraîné par Phil qui sait tout) pour, grâce à l'intervention de Freddy, remonter tout droit une pente de 80 m. et retrouver le chemin qui dans le dernier km degringolait la colline mettant mes cuisses à la cuisson.

Toujours est-il que je suis arrivé à Scoffera où j'ai pris le bus pour rejoindre l'hôtel de la poste de Torriglia, une grande ville où je profite un peu des avantages de la vie hors des bois.

Vous aurez d'ailleurs une surprise demain.

A demain donc. Je vous aime.

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Jour 32 Passo di Scoffera-Passo della Scoglina

Une fois n'est pas coutume, je commence par la surprise. J'ai décidé de vous envoyer une photo de moi nu.

Oh pardon (et désolé pour les déçus) je voulais dire une photo de ma tête nue.

"Que dis-tu Françoise ? Comment cela ils l'ont échappé belle ! Et bien merci . Tu es sensée être la voix de la sagesse et arrêtez de rire les autres."

Bref j'ai profité de mon après-midi en ville pour passer chez le barbier. "Non je n'étais pas à Séville, Bill."

Après une nuit passable chez un "profiteur de pèlerins" qui demande le même prix que les autres mais sans demi-pension et dans une chambre miteuse et bruyante, je reprends le bus pour Scoffera pour retrouver "Le chemin". Il est 7 h. quand je m'élance vaillamment sur les sentiers de l'Alta Via. La première montée est vraiment costaude et m'emmène au prix de gros efforts sur une crête à 990 m. d'altitude où je dépose Jack pour une pause-repose-épaules bienvenue.

Le moment est magique et je ressens le besoin de réciter la prière de St-François qui nous accompagne depuis plus de 40 ans.

Le reste de la journée va se dérouler en deux mots que vous allez encore souvent: monter, descendre.

Et les montées sont toujours dures, les descentes toujours raides, les sentiers toujours escarpés, les chemins toujours bucoliques, les lézards toujours verts mais mes jambes de plus en plus lourdes.

J'arrive pourtant dans un village au doux nom de Barbagelata (1110 m. d'altitude) où, je précise, il n'y a ni barbier ni marchand de glace mais une très belle église moderne qui incite à la méditation.

Ce village devait être le final de mon étape mais le logement que j'ai trouvé se trouve 2 km plus loin. Hardi mon ami, la douche est proche.

3 choses à ajouter pour cette étape

- C'est la première fois, hors WE, que je rencontre quelqu'un sur les chemins italiens. Les 5 jeunes gens rencontrés au petit matin avaient l'air tout aussi étonné que moi.

- Pour la première fois aussi ma polyarthrite s'est fait ressentir en s'attaquant aux jointures de mon majeur et mon annulaire gauche. C'est sûrement d'avoir serré mes bâtons pour m'aider à grimper. Un dafalgan et plus de bâtons à gauche. On verra plus tard.

- J'ai passé ce matin le cap des 800 kms.J'en suis ce soir à 810,7 kms d'après les calculs par satellite de Freddy et 13.728 m. d'ascension totale.

Je passe la nuit avec le dragon d'un guest house appelé: Il drago bianca.

Si je survis...

A demain. Je vous aime

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Jour 33 Passo de Scoglina-Monte Aiona

Journée dantesque à vous raconter.

Mais commençons par le début: la fin de la journée d'hier. Pour arriver au "Dragon Blanc", mon B&B du jour, j'avais dû quitter le "chemin" pour grimper (encore) 800 m. de fort dénivelé qui m'avaient littéralement cassé les pattes.

J'y étais à 14 h., une heure avant mon rendez vous avec Anna qui m'avait bien plu au téléphone en s'exclamant:" uno pelegrino! Benvenuto!". Je décide donc de lui sonner. Elle me répond: "Arrivo presto". En effet moins de 20 min plus tard elle arrivait. Déjà en garant sa voiture, on devinait la femme énergique, boule de nerf qui en reculant touche un arbre, sort de sa voiture en criant: "Filipo, Va bene, benenuto". Elle me prend par le bras, m'emmène dans mon appartement et dans un baragouinage mi italien, mi anglais me fait comprendre que je suis chez moi pendant qu'elle fait mon lit, qu'elle reprend l'aspirateur et qu'elle file nourrir sa dizaine de chats et ses cinq chiens. Je n'ai toujours pas su placer un mot.

Au souper, elle m'installe une table dans le jardin et arrive avec des morceaux de sangliers marinés dans une sauce tomate de derrière les fagots avec des courgettes du jardin en cuisson beurre et une bouteille de Barbera alors qu'entretemps elle a nourri le cheval et les poules et discuté avec les voisins. Elle prend le temps de venir me parler. Elle me dit que elle aussi a été à Taizé quand elle était jeune, que si elle a pris cette idée de dragon, c'est pour sortir les gens de leurs ennuis quotidiens et leur donner du rêve et au moment où je lui demande ce que je dois elle s'excuse de demander la moitié de ce que le voleur du jour précédent m'avait demandé.

C'est le genre de personnes qui sans grande révolution font avancer le monde dans le bon sens, celui de l'amour. En y pensant, je me sens privilégié d'avoir vécu 40 ans avec une femme comme celle là. Une drôle de sensation dans la tête et au niveau du cœur me dit que le message est bien passé.

Mais me voici ce matin tout bînôche de descendre ces 800 m. qui m'avaient semblé si longs. Au moment de prendre ma photo du soleil se levant sur les montagnes, je me dis qu'avec mon crâne nu il vaut mieux mettre le chapeau. Mon chapeau...

Et oui ! Retour au Dragon Blanc, sans Jack que j'abandonne hurlant au secours sur le bord du chemin.

Chapeau et Jack récupérés, me voici parti pour une courte étape de 14 kms.

Les 3 premiers se passent à plat sur le goudron sans grande difficulté. Arrivé à Cabanne (non ce n'est pas au Canada, Bill ), premier problème: pour la première fois Lapin et Freddy ne sont pas d'accord. Je soupçonne le Freddy d'avoir programmé un raccourci pour me faciliter la tâche. Il faut choisir. Je décide de rester fidèle au "chemin" en me disant:" Dji su né v'nu jusk'arci pou prindre des r'courcis" *

Et j'ai bien fait. Le chemin à partir de là était un vrai enchantement. J'ai suivi une rivière, j'ai grimpé jusqu'à 990 m. pour trouver une chapelle perdue et puis encore quelques dizaines de mètres pour dîner près d'un refuge tout en étant passé la barre des 1300 m.

Après le dîner tout s'est gâché..

A un embranchement de route, je devais prendre à droite pour rejoindre mon B&B du jour. Je n'ai jamais trouvé cet embranchement et quand 10 km plus loin j'ai téléphoné pour dire où j'étais ils ne m'ont pas compris. J'ai essayé d'envoyer ma position GPS: pas de réseau. J'étais perdu au milieu des bois. J'ai entendu une voiture. J'ai couru pour l'arrêter. C'était 2 jeunes qui se debrouillaient en anglais. Ils me confirment que je suis 10 km trop loin et, comme il commence à pleuvoir (orage), décident de m'avancer en voiture. Je descends la plupart des km que j'ai faits tout à l'heure. Ils m'expliquent que pour aller chez Zanoni, je dois terminer à pied. Ils me déposent donc. J'avance à pied quelques kms pour surplomber sur une cornière abrupte le B&B en question. La pluie redouble. Je décide de ne pas risquer ma vie et fait demi tour pour prendre une route normale. Mon GPS m'indique alors encore 8 kms à faire. J'accélère l'allure et arrive finalement chez Zanoni d'où je vous écris après 30,650 km.

A demain. Je vous aime.

* traduction pour mes amis français : je ne suis pas venu jusqu'ici pour prendre des raccourcis.

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Jour 34 Monte Aiona-Passo del Bocco

Après la journée d'hier, j'ai décidé d'y aller piano aujourd'hui surtout que je suis dans un endroit parfait pour le repos et la méditation. Imaginez un refuge au milieu des montagnes avec pour seuls moyens de communication quelques sentiers de chèvres et un chemin seulement permis au 4×4. Le silence complet seulement coupé par le cri strident d'une buse où la cloche lointaine d'une vache égarée.

J'ai donc profité de cet endroit de rêve jusqu'après le dîner. J'avais goûté à leur cuisine hier soir et je me réjouissais d'en reprendre. De plus ils sont d'une gentillesse sans pareil. L'endroit est propre et accueillant. A recommander: Rifugio Malga Zanoni.

A peine le dîner terminé, il était temps de prendre congé pour la courte étape de 7 km qui devait me mener au Passo del Bocco. Ce qui fut fait en 1h30 avec une première partie agréable dans les bois où les ruisseaux étaient tout heureux de s'écouler plus rapidement grâce à l'apport de l'orage d'hier.

La seconde, 4 km de bitume, était moins grisante mais a eu le mérite de m'amener rapidement au refuge d'où je vous écris.

Puisqu'il me reste un peu de temps et de place j'aimerais vous souhaiter de tout mon cœur de connaître un jour une expérience telle que la mienne. N'attendez pas d'être veuf (veuve). N'attendez pas d'être blasé par la vie. N'attendez pas d'être pourri par des questionnements ou des hésitations.

Toute remise en question, avec l'accord de son entourage est toujours bénéfique. Si je vous dis cela c'est parce que...

Je vous aime. A demain

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Jour 35 Passo del Bocco-Colla Craiola

Une bonne nuit de repos suite à un excellent repas servi par un personnel très gentil. Que demander de plus ?

Et bien, je leur ai demandé un pique-nique car le gîte où je dors ce soir ne fais pas de repas. Deux belles grosses tartines au prosciutto et au fromage s'enfournent dans Jack qui hume les odeurs. Il n'aura pas à saliver longtemps puisque je me lance dans ma plus courte étape (6 km) toujours pour reposer mes jambes. Cette étape devait en faire 22. J'ai décidé que c'était trop long.

Me voici donc parti pour 5 km de bitume et un dernier de chemin.

Malgré le bitume, le décor est magnifique. Je remarque quelques voitures arrêtées au bord du chemin un peu n'importe comment. Je comprends un peu plus loin. Les orages de ces derniers jours ont permis l'apparition de nombreux champignons et ce sont donc les amateurs de "funghi" qui s'empressent de trouver les bons endroits.

Nous traversons des bois un peu comme ceux de nos Ardennes.

Ça et là, des ruisseaux coulent à travers des hêtres centenaires. Le pas léger, j'avance. L'ambiance est à la sérénité.

Françoise m'interpelle tout à coup: "Tu sais, mon cœur, depuis que je suis "esprit" tous les 24 du mois tu m'écris un petit mot, une chanson ou une poésie. Nous sommes le 28...

- Mais tu es avec moi sur le chemin, m'excusais je.

- C'est vrai et je suis heureuse de faire partie de cette aventure. Ce n'était pas un reproche. C'est même remarquable que tu puisses dépasser la tristesse qui t'étreignait encore pour rebâtir du neuf. Je serai de toute façon toujours avec toi. Tu dois reconstruire ta vie.

Je garderai pour moi la suite de la conversation mais tout le reste du chemin je me suis posé la question sur le fait que depuis un mois, je n'avais écrit aucune rime.

La réponse m'est venue, évidente.

Sur ce chemin tout est poésie. Les troupeaux qui gambadent librement dans les Alpages, l'autour qui plane au dessus des prairies, les ruisseaux qui s'épanouissent dans le moindre vallon, les genêts et les bruyères qui s'inscrustent au milieu des rochers, le doux babillage excité de nos amis italiens. Pas besoin d'écriture: la poésie se vit, se lit sur ces cîmes et sur ces visages burinés par le soleil.

C'est dans ces réflexions que j'arrive juste avant 10 h. chez mon hôte du jour.

Il ne m'attendait pas de sitôt. Je patiente donc sous un auvent extérieur en vous écrivant ma petite bafouille et en vous répétant: "A demain. Je vous aime."

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Jour 36 Colle craiola-Passo del Cento Croci

5h15. Rien ne bouge dans la propriété. Je sors courageusement de mon lit en me disant que puisqu'on annonce des orages l'après-midi autant marcher le plus possible le matin.

"Oui mais, malin, on ne va pas marcher dans le noir", dit Grizzly

"le temps que je range, que je déjeune, que je me brosse les dents, que je charge Jack, il fera clair", répondis je.

"Pour me charger, tu as bien le temps", grogna Jack.

"A propos de rangement, j'aurais du faire mon coup de gueule plus tôt, tu n'oublies plus rien Phil", rigola Benaless.

"Bon. Allez! On se presse" terminais-je.

Il était 6h30 quand je fermais la porte de l'appartement et que je reprenais la route non sans avoir auparavant fait quelques photos du lever du jour.

Tout le long du chemin, je devais me forcer à ne pas trop m'arrêter tant était puissante l'envie d'immortaliser tous ces moments et ces paysages encore une fois superbes.

Les deux journées de semi-repos ont fait du bien à mes jambes et ont surtout permis d'éloigner les douleurs à ma main gauche.

En avançant sur ces routes, je réfléchissais à cet être extraordinaire qu'était St François. J'ai eu le temps hier de relire l'excellent travail d'un ami sur François et je riais en y pensant car une de ses caractéristiques principales pour moi était sa joie profonde en toutes circonstances. Alors que pour un orteil un peu rouge, pour deux articulations un peu gonflées, je m'inquiète et m'apitoye sur mon sort. Lui, il chante les louanges du Seigneur et de l'univers.

Je ne me suis quand même pas mis à chanter pour ne pas avancer l'arrivée de l'orage mais j'ai gardé le sourire et mon côté positif jusqu'à la fin de l'étape.

Petite surprise à la fin de celle-ci quand je téléphone à l'agriturisme où j'avais réservé."Mais vous êtes beaucoup trop loin, me dit-on, vous êtes à 22 kms."

"Vous ne pouvez pas venir me chercher?" tentais-je.

"On arrive. Attendez nous"

Une demi heure plus tard je voyais arriver une voiture avec une jeune fille qui s'adresse à moi en français. Tout allait bien.

Après un parcours sportif à travers des défilés et des collines nous arrivions à la bien nommée: il pellegrino. Magnifique mais suite...

A demain. Je vous aime

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Jour 37 Passo del Cento Croci-Adelano

Arrivé très tôt dans mon agrirurismo, j'ai pu profité d'un peu de repos mais aussi de la rivière du coin (le taro) où, courageusement, j'ai été me baigner malgré les frayeurs de Françoise qui me prédisait un arrêt cardiaque. C'est vrai que l'eau n'était pas très chaude mais une fois dedans c'était bon et il y avait la place pour nager.

J'ai bien été reçu et très bien mangé. Tout allait pour le mieux jusqu'au moment de recevoir la note. Au prix annoncé pour la demi-pension, la patronne avait ajouté 40 euros pour les 2 navettes. 1 euro du km cela me paraît énorme mais je n'ai rien dit. Je suis un peu triste que le système de refuge ou d'accueil paroissial ne s'étende pas jusqu'ici. Cela donnait à mon pélé un cachet supplémentaire. Ici, je me sens plus dans la peau d'un touriste. Dommage.

Toujours est il que me revoilà sur les routes bien plus tard que les autres jours puisqu'il est 8h45 quand je démarre du Passo del Cento Croci. Une heure plus tard après la grimpette d'une colline, je me trouve devant une stèle honorant la mémoire d'un aviateur décédé à cet endroit et innocemment je me dis qu'il y a pire endroit pour mourir.

Quelques centaines de mètres plus loin, je rentre dans un magnifique bois de hêtres digne de servir à un film de science fiction. Je ferais des photos tous les 10 mètres. En avançant j'arrive à un croisement de chemins nommé Passo del Lupo. Mon road book conseille de prendre le chemin de gauche car celui de droite nettement plus sportif nous emmène à 1600 m. d'altitude au somment du mont Gottero.

Je sens le besoin de questionner mes petites voix intérieures.

Françoise ne dit rien. C'est bon et mauvais signe.

Bill dit que si c'est plus sportif ça peut être plus rigolo. Il est pour.

L'étourdi ne comprend pas la question et cherche après le bébé éléphant que je viens de photographier.

Benaless avec humour me dit que je ne perds rien d'essayer.

Et enfin Grizzly prétend lui que je je n'y vais pas je le regretterai toute ma vie.

J'y vais donc. Mais quelle ascension! Les pentes descendent rarement sous les 20 %. Je prends un rythme lent que je ne quitte pas jusqu'au sommet.

Arrivé au sommet, les larmes au yeux, je contemple un magnifique point de vue à 360 degrés un peu gâché par des nuages flottants. Je ressens le besoin de rendre grâce au Seigneur et à la vie de me donner de tels moments à vivre. Je pense à vous tous qui me soutenez dans cette folie.

Un peu inquiet par l'amoncellement de ces nuages, je décide de descendre vers mon but final de cette étape. La descente est aussi sportive et je fais de tous petits pas pour épargner mes cuisses. Aussi sportive mais plus longue que la montée, elle m'amène vers 14 h. chez mon hôte du jour à 789 m.: un superbe agriturismo appelé "la Vecchia Cascina ".

Avant cela je suis passé à l'ermitage Ste-Marie Madeleine. J'aurais aimé parlé avec l'ermite (un franciscain) mais il ne parle que l'italen et n'aime pas être dérangé trop souvent. J'ai passé un moment dans son église où François a une place d'honneur.

Superbe journée donc où le passage au milieu de ces (h)êtres centenaires restera comme une des étapes mémorables de ce pèlerinage et un de mes plus grands exploits sportifs.

Note négative. Je me fais un plaisir de vous partager des photos des ruisseaux et des rivières. Aujourd'hui je vous en montre une autre (comme c'est malheureusement la majorité) à sec.

Quand réagirons-nous ? Sur ce... A demain. Je vous aime.

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Jour 38 Adelano-Passo de I Casoni

Ce matin je commence la seconde moitié de mon pèlerinage. Point de vue timing parce que en Km je suis plus loin que la moitié. En effet sur les 74 jours prévus 37 sont déjà passés .

A mi-parcours j'ai l'impression de vivre l'expérience de ma vie tant dans les échanges que dans les moments de solitude et d'efforts physiques. J'ai le grand regret de ne pas avoir eu l'occasion de vivre cela avec Françoise en chair et en os mais elle est vivante et présente autrement et c'est une satisfaction pas seulement dans ma prose mais surtout dans mon coeur et mon âme.

Ma vie ne sera plus comme avant. Je le sais. Je le sens. Ce qui va changer je ne le sais pas encore mais je sais que je serai plus attentif à la terre mère et à "l'autre" surtout s'il souffre ou s'il n'est pas heureux.

Sans doute la seconde partie de ce pèlerinage, avec comme point d'orgue mes pas dans ceux de François, changera encore la donne. Nous en reparlerons.

Aujourd'hui c'est à 4h30 qu'un violent orage a décidé de me réveiller. Je reste un peu dans mon lit mais impossible de me rendormir. Alors debout.

Je remets tout en ordre avant de déjeuner et de préparer mes affaires de pluie. J'enrobe Jack de son maillot jaune.(Le voilà Jack lemon). Je prépare mon k-way et j'étudie le parcours. Freddy me dit que la première partie composée de petits chemins de montagne risque d'être humide et rendue difficile par les pluies, ce à quoi lapin, cartes à l'appui, rétorque qu'en faisant un peu de goudron en plus on peut rejoindre le" chemin" plus loin à l'endroit où il s'élargit et se change en chemin forestier. Nous choisissons donc cette solution. La pluie m'accompagne encore quelque temps après le départ mais au fur à mesure de la matinée, elle se retire en laissant place à des nuages menaçants. Cela fait mon plaisir car le mélange nuages et paysages donnent des images grandioses. C'est encore une très belle étape. Je n'avais jamais entendu parler de la Ligurie avant mais je la quitterai bientôt avec peine.

Arrivé à ma halte de la journée avant midi j'en profite pour me restaurer. Il me restait juste quelques biscuits et deux poires pour dîner. Gardons les pour ..

A demain. Je vous aime.

 

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Jour 39 Passo de I Casoni-Novegigola

Belle soirée et bonne nuit dans ce refuge de chasseurs changé en refuge/restaurant. Les gérantes chantaient tout le temps. Elles ont ri aux éclats quand j'ai entonné un chant italien avec ma voix de ténor. C'est un vieux chant des chasseurs alpins que nous avions appris à Mellet avec M. Passone: "Aprite le porte". J'ai constaté avec joie que "Polly" ne m'avait pas encore pris toute ma voix.

Ce matin, j'ai pris le temps de me lever pour démarrer vers 8h30.

Je devais en avoir pour quelques heures. Le chemin était assez simple et empruntait souvent des "sterrata", sorte de routes forestières assez larges qui servent aux forestiers et aux agriculteurs. Ayant bien lu le road book je partais confiant.

Quelques centaines de mètres plus loin, le chemin large se rétrécit pour devenir un sentier de biquette où plutôt de vaches puisqu'il est envahi de bouses reconnaissables. Je consultai Freddy qui me dit que, en effet, je déviais du chemin mais que je pouvais le rejoindre plus loin. La prudence me disait de faire demi-tour mais mon Phil têtu me poussait à aller de l'avant. Si les vaches peuvent passer pourquoi pas moi.

Plusieurs dizaines de mètres plus loin je me retrouvais au dessus d'un abrupt de 15 m. sur un petit sentier toujours garni de belles bouses. Françoise et même Grizzly fermaient les yeux et priaient je ne sais quel Saint tandis que Bill se marrait en se demandant si j'allais mettre le pied dans la bouse.

Je l'avoue, je n'en menais pas large mais l'abrupt passé et le chemin de Freddy retrouvé j'ai décidé de ne plus avoir d'idées préconçues sur l'agilité des vaches et de regarder plus souvent mon GPS.

Le reste du chemin vers Novegigola m'a offert de magnifiques vues sur la mer de ligurie qui n'a jamais été si proche. Malheureusement le soleil caché m'empêchait de vous en faire profiter. J'ai quand même fait quelques essais que je vous soumets. Arrivé à mon agriturismo à 13 h., j'en profite pour manger, étant donné que je ne rencontre aucun magasin depuis plusieurs jours et que mes denrées se font rare.

La dame accepte de me donner la chambre avant l'heure ce qui m'arrange bien pour vous écrire ...

A demain. Je vous aime.

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Jour 40 Novegigola - Aulla

Pour vous informer, j'ai du quitter hier le confort de mon agriturismo avec son internet foireux pour monter sur une colline trouver du 4G. Cela m'a permis de comprendre pourquoi il s'appelait "les chênes". A l'arrière de l'établissement se trouve une chêne absolument splendide. J'ai voulu lui faire un câlin. Je n'entourais pas la moitié de l'arbre avec mes bras.

J'ai passé une bonne nuit à cet endroit terminée à 5 h avec un gros orage. Plus que l'orage, ce qui m'inquiétait c'est une douleur assez forte au niveau de mon tendon d'Achille droit. Je décidai de me masser énergiquement et d'attendre un peu pour questionner mon vieux pote Pascal sur le sujet. A 6h50 je me dis qu'un médecin est déjà sur le pied de guerre. Hé bien non! Je lui ai ôté 10 min. de sommeil. Il me répond gentiment que, d'après ce que je lui raconte ce doit être, une bursite et donc pas trop grave, à soigner avec des bains d'eau froide. Je trempe directement mon pied dans l'évier, exercice périlleux avant le déjeuner.

A 8 h., j'étais parti presque toujours en descente ce qui m'a permis de rencontrer deux torrents dans lesquels j'ai recommencé l'opération immersion.

Après un de ces torrents, j'ai raté un Tau et le temps de consulter Freddy, j'avais fait 2 bons kms. Demi-tour.

J'ai grimpé ensuite une belle côte pour me retrouver devant le sanctuaire Notre Dame de la Neige et c'est juste après celui-ci que j'ai eu le CHOC de ma journée. C'est d'abord le bruit qui m'a alerté, ce bruit caractéristique de la circulation de centaines d'autos et puis en me penchant je l'ai vue là sous mes yeux, avec ses tentacules industrielles et ses quartiers commerciaux: la ville.

Depuis mon départ de Campo ligure je n'y avais plus été confronté. C'est surtout Grizzly qui a été choqué. Il s'est renfermé comme une huître. J'ai tenté de réagir en entamant une chanson. La première qui m'est venue est "La petite fugue" que Catherine Le forestier chantait avec son frère mais rien n'y faisait. En plus le chemin nous faisait passer dans des endroits où de nouvelles villas à quelques millions se pavanaient sous le soleil revenu. Je dois loger dans cette ville et pourtant je n'ai qu'une envie, m'enfuir dans les montagnes suivantes. Je ne le ferai pas car j'ai réservé au monastère San Camprasio. Au moins ce soir j'éviterai cette ville en partageant le dortoir avec d'autres pèlerins.

A demain. Je vous aime

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Jour 41 Aulla - Bardine

En profitant de l'hospitalité de la communauté de San Caprosio, j'ai pu découvrir plusieurs choses.

D'abord que San Caprosio est un martyr provençal du 4e siècle dont les reliques sont arrivées par un mariage dans la ville d'Aulla où elles sont vėnérées depuis le 12e siècle.

Ensuite, je me suis rendu compte que Aulla est depuis le début une ville étape importante de la Via Francigena.

Ceci pour vous dire que pour une fois je n'étais pas seul. Partageaient avec moi cette auberge: un hollandais, Michael qui faisait lui aussi le chemin d'Assise, un américain, un espagnol et deux suissesses qui suivaient la Via francigena.

Comme Mickael parlait français et qu'il marchait sur le même chemin que moi nous avons décidé d'aller souper ensemble dans une pizzeria où nous avons fait suffisamment connaissance que pour décider de faire une partie de route de concert.

Nous voilà donc ce matin, après un petit café et un croissant dans un bar, en route pour Monzone. Pour une fois je n'ai pas d'endroit pour loger, toutes les maisons où j'ai téléphoné n'étant pas disponibles.

Pour sortir d'Aulla, nous devons suivre un route nationale très empruntée où il n'y a pas de trottoir. Nous y rencontrons une dame qui accepte de nous prendre en photo et dont le mari est originaire de Mont-sur-Marchienne. Plus loin, une femme nous entendant parler français se propose de nous aider. C'est une française mariée à un italien. Elle étudie les insectes et nous emmène faire connaissance avec l'araignée tigre. Nous la suivons tellement elle est passionnée et passionnante.

Il nous faut bien continuer et nous nous promettons de garder le contact. En marchant, je sens bien que je ne saurai peut être pas tenir les 20 kms de l'étape. Voyant un agriturismo, nous nous adressons à eux, Michael maîtrise bien l'italien mais ils n'ont plus de place. Ils appellent alors une dame d'un autre village qui accepte de me recevoir. Elle quitte son boulot pour m'accueillir. C'est en l'attendant que je vous écris .

J'ai donc laissé Michael continuer la route seul en regrettant les excellents moments partagés avec lui et la profondeur de ceux-ci. Là aussi nous décidons de garder le contact.

C'est avec au cœur toutes ces rencontres que je vous dis.

A demain. Je vous aime.

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Jour 42 Bardine - Equi Terme

Quand je vous ai laissé hier, j'attendais une dame de La Spezia qui devait venir m'accueillir dans son B&B. Elle devait en avoir pour une 1/2 heure. Deux heures après, je vois arriver une femme qui m'entraîne à un autre bout de village. Je comprends que la première femme ne sait pas me recevoir et qu'on me logera allieurs. Elle m'emmène dans une maison avec cuisine, chambre et toilette avec évier, me dit qu'elle ne fait pas à manger et qu'il n'y aura pas de déjeuner, me donne la clé en me demandant 60 euros. Coincé, je lui donne en pensant aux nombreuses nuits où pour la moitié j'avais la demi-pension.

Enfin j'ai un toit. Il n'est pas tout à fait sur le chemin. Mais ça va d'aller.

Je cours au magasin avant la fermeture. Je m'achète de quoi souper et, en rentrant, je remarque une porte qu'elle ne m'avait pas montré. Je rentre. Une chambre avec douche. Je ne me servirai pas de la chambre mais la douche... pour 60 euros je peux bien.

Après cette bonne souche interdite (c'est fou comme l'interdit attire), j'a soupé, trempé mes pieds dans l'eau froide et sauté dans mon lit pour une bonne nuit.

Au lever, il fallait résoudre le problème de retrouver le chemin d'Assise. Pas de réseau donc pas de Lapin. Freddy est trop compliqué pour mon petit cerveau. C'est donc avec une carte d'état major que j'ai retrouvé la direction de Monzone qui devait être mon étape finale. J'y suis arrivé après 4 h. de marche pour m'entendre dire qu'il n'a plus de place. Il semble qu'il y ait plus de pèlerins en septembre.

Une messe commence. J'y vais.

En sortant, je m'adresse à un couple de jeunes qui parlent anglais et leur demande s'ils ne connaissent pas un établissement dans le coin qui pourrait m'accueillir. Après un coup de fil, c'est réglé. On m'attend à Equi Terme, à l'auberge de la poste où on me propose pour 60 euros la pension complète... et où je retrouve Michael le temps d'un repas.

Equi Terme est un superbe village thermal aux ruelles moyenâgeuses et avec une superbe grotte bizarrement fermée. Je vais y passer un bel après-midi.

Avec toutes ces péripéties, j'ai omis de vous dire que j'étais entré en Toscane qui après la Bourgogne, les Alpes, le Trentin et la ligurie est la sixième province que je foule de mes pieds.

A demain. Je vous aime

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Jour 43 Equi Terme - Gravelozzo

Je suis tombé amoureux de ce village. Il y a ici de nombreux points qui m'attirent. D'abord le côté sauvage avec ces montagnes, la grotte, le torrent et les ruelles moyenâgeuses du vieux quartier. Ensuite les thermes. Dieu sait que pour une personne souffrant d'arthrites, l'eau, les massages et les soins peuvent être bénéfiques. Enfin le soleil et la saveur de l'Italie.

Assurément un de mes coups de cœur. Et aussi coup de cœur de Grizzly qui s'approprierait bien la grotte.

Au déjeuner, je reçois un message de Michael qui me prévient que la montée vers Ugliancaldo est une des plus difficiles du chemin et que je pourrais faire du stop. Un homme averti en vaut deux. C'est donc avec la volonté de 2 hommes que je me lance vers 8h30 dans ce chemin de muletiers. Nous sommes à 220 m. d'altitude. A 9h35 à Ugliancaldo, nous sommes à 732 m.

Ce sentier est costaud mais de toute beauté. On est accompagné tout le long du parcours par le bruit rageur du torrent qui cavalcade dans les sous bois, bondit par dessus les rochers et zigzage entre les châtaigniers.

Etant prévenu, je ne me suis pas lancé à grande vitesse. J'ai utilisé la méthode qu'un de nos chefs scouts de Gosselies (il y a 50 ans) nous avait apprise. Son idée était que dans une montée, il ne faut jamais s'arrêter de peur de ne pas savoir repartir. Il nous disait de garder toujours le même rythme de pas et en cas de difficultés, de le diminuer fortement si besoin, voire faire du sur place. Pour nos côtes belges, cela fonctionne. Pour celle-ci qui ne durait qu'une heure, qui plus est en montagne, on grimpe souvent plusieurs heures. Des arrêts sont conseillés.

De Ugliancaldo, il me suffisait de redescendre un peu par un beau chemin forestier pour arriver à l'endroit de ma halte: Gravelozzo.

Il est à noter que la végétation change. Les grandes forêts de hêtres, de chênes et de sapins laissent place aux châtaigniers, aux noisetiers, aux marronniers et de plus en plus fréquemment à des oliviers ou des figuiers. Bill me tente chaque fois en disant: "Prends en une. C'est le moment. Elles sont mûres" Je résiste, difficilement, mais je résiste. Il est aussi à noter que l'étourdi est de plus en plus présent. Il m'a fait oublié mon chapeau quelque part et comme Benaless profite de plus en plus de ses vacances, elle n'a rien remarqué. J'ai donc transformé ma taie d'oreiller qui ne m'avait servi qu'une fois en fichu anti-soleil. Cela me donne un autre look.

A demain. Je vous aime.

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Jour 44 Gravelozzo - Vagli di Sotto

Ce qui est bien en marchant le matin, c'est que l'après-midi j'ai le temps de me reposer mais aussi de découvrir le village qui m'accueille. C'est pourquoi vous avez toujours le lendemain quelques photos de ma halte du jour.

Me voici à 8 h. sur les routes de Toscane vers le village de Gorfigliano où se trouve une vieille église qui, paraît-il, vaut le détour. Je fais donc ce détour (qui bien sûr monte) pour trouver l'église fermée. Qu'importe le cadre et le chemin pour y accéder valaient déjà la peine. Je me dirige ensuite vers mon étape du jour Vagli di Sotto.

Et là pour grimper... çà grimpe. Mais la route au milieu de ces bois de châtaigniers à l'âge respectable et au diamètre parfois impressionnant est encore une fois un ravissement pour les yeux. Je rencontre régulièrement des camions qui transportent le marbre extrait de ces montagnes, notamment le marbre blanc. Ce sont les mêmes montagnes que le célèbre Carrare où Michel-Ange se fournissait pour ses statues.

"Michel-Ange la tortue ninja ? "Demande l'étourdi.

"Non, répond Françoise, celui de David ou de la chapelle sixtine. J'ai fait mon mémoire sur le plafond de la chapelle sixtine"

"Et moi j'ai dansé sur les sixties", lance Bill.

"Bon on avance les gars ! " coupai-je.

Arrivé au sommet de cette côte, le "chemin" m'emmène à l'ancien village de Vagli qui a été rénové en lieu d'excursion et de tourisme.

C'est magnifique et je décide d'y passer un peu de temps et de délester Jack de quelques nourritures l'encombrant depuis quelques jours. Cela ne fera pas de mal à mon dos et à mes jambes .

Après ce bon repas, je descends sur Vagli par un très joli sentier parsemé de chapelles et de bancs.

Il ne me reste plus qu'à trouver l'auberge du lac. En y arrivant freddy me fait remarquer que je suis à 999,2 kms. Une petite photo du lac pour vous et pour moi les 1000 km.?

A demain. Je vous aime.

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Jour 45 Vagli di Sotto - Vianova

Dans cette petite auberge au personnel sympa et au prix " pèlerins ", quelle ne fût pas ma surprise de voir arriver le soir 7 autres pèlerins de nationalité française. Ils ont commencé le chemin voici 6 ans mais ils font transporter leurs bagages par un des sept en voiture. Nous avons l'occasion durant le souper d'échanger nos avis sur le parcours, ses beautés et ses difficultés.
Assurément ils sont du même avis que moi, l'étape de demain est répertoriée parmi les plus dures. 1100 m. de dénivelé positif et 1060 de négatif.
J'ai donc bien fait je crois de la diviser en deux.
Parti dès 8 h., je décide de traverser le pont Morandi (oui le même constructeur qu'à Gênes) fermé à la circulation pour gagner +/- 3 kms et j'affronte presque directement la pente. Cela va grimper pendant 2 h. avec des pentes avoisinant parfois les 30%. Comme je sais que mon étape est très courte, je prends mon temps et à 10 h. je suis à l'altitude 1157 à 20 min. de mon lieu de repos.
Tout compte fait, me dis-je, j'aurais pu faire toute l'étape.
"Tu as bien fait, me dit Françoise, tu es en avance et tu dois te ménager".
Il n'empêche depuis un mois j'ai l'impression d'être dans des montagnes russes où les montées et les descentes te puisent ton énergie et augmentent le carburant. Ça ne vous dit rien?
Arrivé à Vianova petit village près de Porreta, j'attends à l'extérieur du bâtiment, bien installé sur une chaise, que celui-ci ouvre.
En attendant, Bill me glisse à l'oreille: "On est en Toscane pas loin de Florence. Tu connais la principale différence entre Florence et Garmish-Partenkirchen ?
Je réponds non bien sûr.
" A Florence on a une chance de trouver une fille qui s'appelle Florence"
Sur ce...
A demain. Je vous aime.

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Jour 46 Vianova - Isola Santa

J'ai passé une bonne nuit dans ce joli B&B tenu par deux gentils petits vieux qui ont tout fait pour rendre mon séjour agréable. Je suis seul ou presque puisque j'ai entendu des bruits de porte la nuit durant l'orage qui a bien arrosé la région.
Au matin après un bon petit déjeuner, je paye mon dû. Je mets la capote à Jack car le temps n'est pas encore sûr et je démarre. 100 m. plus loin, je ressens le besoin de vérifier mon ticket de caisse ayant payé par carte. Là je m'aperçois que j'ai donné 50 cents. Commence le briefing.
Bill: C'est pour les fois où on nous a volé. On continue
L'étourdi: Voler! On va voler?
Françoise: On retourne le payer. Ils ont été sympa avec toi.
Phil: Et toi, Grizzly qu'en penses tu ?
Grizzly: De toute façon tu vas retourner. Donc fais le maintenant et pas après 3 km.
Le cœur et l'esprit plus léger me voici donc quelques minutes et quelques "Grazie" plus tard à descendre tout le dénivelé que j'avais monté hier mais de l'autre côté.
Encore une fois le plaisir de traverser ces régions me monte à la gorge. De plus, avec le soleil naissant et le restant de brumes laissé par l'orage les forêts et les
sommets appellent à la pause photo. Lapin clique à tout va.
Partout des chapelles invitent à la prière ou la méditation.
Les sentiers sont parfois encombrés et plusieurs fois Jack m'invitent à faire un cours détour devant un arbre tombé en me criant: "On ne passera pas". Je lui réponds de me faire confiance et il s'entête: "Toi tu passes mais moi pas". Et on passe. Il faut reconnaître qu'une fois il est resté accroché et il m'en veut toujours de cette égratignure.
J'arrive assez tôt à mon étape suivante qui est un vieux bourg médiéval de quelques maisons et d'une vieille église qui donnent à lapin du travail et à vous des témoignages visuels de mon aventure.
A demain. Je vous aime

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Jour 47 Isola santa - Vergemoli

Qu'ène affaire pour vous envoyer des nouvelles hier! J'étais emprisonné entre des montagnes et le réseau passait très difficilement. Heureusement tout a pu finalement partir sauf les photos de ceux que je joins par mail. Mystère.

En sortant de ve village médiéval, je ne m'attendais pas à la journée que j'ai vécue.

D'abord le "chemin" m'a fait descendre encore quelques mètres de dénivelé pour atteindre un torrent 2 km plus loin.

Là, a commencé la pire montée de mon périple. Battues la montée au mont Gotturo, la sortie de Beaujeu ou de Campo ligure. Ici impossible de mettre en pratique les principes de mon chef scout. Tu t'arrêtes parce que tu n'en peux plus. Tu respires. Tu déposes Jack. Tu masses tes mollets. Tu attends que tes jambes arrêtent de trembler.

Heureusement comme depuis de longs jours, c'était splendide. Aux bois de châtaigniers du départ de la montée ont succédé des bois de hêtres, de chênes et de... Ils étaient parsemés ça et là de rochers blanchâtres qui leur donnaient un côté fantasmagorique.

J'avais aussi la chance d'être épaulé par toute mon équipe qui me voyait à la peine. Grizzly disait que cela lui conviendrait de rester ici mais qu'on nous attendait à Assise. L'étourdi me disait de me fixer sur les fleurs, les rochers et que le chemin passerait vite.

Benaless me rappelait de faire confiance à Freddy. "Qu'on ne se perde pas ici !". Bill me proposait de sauter de rocher en rocher. Françoise, elle, priait que je n'ai pas un arrêt cardiaque, une foulure ou une élongation. Je lui ai dit de plutôt faire une prière d'action de grâce en lui rappelant que François d'Assise commençait beaucoup de ses prières par "Laudato si".

Enfin, je suis arrivé au sommet après avoir grimpé 650 m. de dénivelé en 2h30.

Je ne me serais jamais cru capable d'un tel exploit car, croyez-moi, c'en est un. Je me souviendrai toute ma vie de cette "promenade " 133 dans les appenins toscans. Il me restait à descendre à Vergemoli, joli village tout en couleurs qui m'accueille dans sa salle paroissiale avec la simplicité que je recherche. Heureusement la descente, très belle aussi était toute en douceur.

A demain. Je vous aime.

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Jour 48 Vergemoli - Trassilico

Vergemoli est vraiment un très joli village. Je passe du gris de Isola aux couleurs vives de ce petit bled. Dès mon arrivée, j'ai cherché vainement un magasin alimentaire n'ayant plus comme provision que quelques barres céréalières et des fruits secs. J'ai trouvé seulement un bar dans lequel je me rends pour un capucino. La dame me voyant pèlerin me propose de me faire une pizza pour le soir ce que j'accepte avec joie. Je vais donc me reposer dans le local paroissial où j'ai la surprise de voir arriver un belge avec qui j'avais eu des contacts avant de partir quand j'avais fait un appel sur internet pour avoir des conseils sur le "chemin".

C'est donc à deux que nous allons manger chacun une pizza agrémentée d'une bière italienne. Le tout pour 6 €./pers.

Comme quoi il y a encore des personnes gentilles car elle n'a pas gagné grand chose. De plus elle nous propose un petit déjeuner le lendemain, ce que j'accepte encore étant donné mon manque de nourriture.

Je m'y rends seul, mon compagnon de chambrée ayant décidé de partir tôt le matin. Encore une fois, elle m'avait préparé un bon petit déjeuner accompagné de deux capucini que j'ai payé 5 euros. Je la remercie comme il se doit et je démarre.

Pour descendre jusqu'au torrent, il y a deux solutions suivre la route ou prendre un sentier pentu rendu glissant par la pluie de la nuit. Mon gros orteil droit ne supportant plus le bitume j'opte pour le sentier. Et j'ai bien fait. La pluie de la nuit a réveillé toutes les odeurs de la terre et j'en profite pleinement jusqu'au pont romain qui me fait traverser le torrent . En lisant le road book j'avais vu ce qui m'attendait: une grimpette de la même veine que celle d'hier.

Et c'est reparti pour 1h30 de montée heureusement moins pentue qu'hier mais... interminable. Je pensais que je ne verrais jamais les premières maisons de Trassilico. Si c'était moins pentu, c'était parfois périlleux. Je flirtais avec des à-pics impressionnants et il me fallait toute ma concentration pour mettre les pieds aux bons endroits.

Heureusement je suis arrivé dans ce très beau village médiéval d'où j'ai une vue imprenable sur Vergemoli, l'endroit où je logeais encore ce matin.

Aujourd'hui je passe la nuit dans un refuge et demain je ne bouge pas car j'ai rendez vous mais cela c'est...

A demain. Je vous aime.

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Jour 49 Trassilico - Trassilico (Cardoso)

Je vous parlais hier de rendez-vous. Et bien, en ce jour j'en ai deux, un avec un couple d'amis et l'autre avec vous.

Le premier, quand il m'a été proposé, m'a posé question et puis il s'est imposé en moi comme une chance et aujourd'hui c'est avec impatience que je les attend.

Je vous explique. Pierre et Ginette sont un couple d'amis. Au moment où j'ai fait ma demande de don pour ce périple, ils m'ont proposé un autre type d'aide. Ils se mettent à ma disposition durant une semaine pour porter les sacs, trouver un endroit pour loger et pour manger. En quelque sorte ils deviennent mes intendants. D'abord surpris par la démarche, j'y ai vu le plaisir de partager un projet avec des personnes qui y croient et que j'apprécie . Maintenant après les journées éreintantes que je viens de traverser, je vois aussi un fameux coup de boost moral et physique. Merci déjà à eux.

Mon second rendez-vous est avec vous et surtout avec toutes vos connaissances. Vous connaissez tous maintenant les motivations de cette aventure. Il y en a des personnelles mais surtout j'aimerais aider les deux associations pour lesquelles je me suis engagé.

Arthrites.be ( www.arthrites.be )tente d'accompagner, de sensibiliser et d'informer les personnes atteintes de maladies rhumatismales. Je suis moi même atteint de polyarthrite et ma démarche de ce jour veut prouver qu'une maladie bien soignée et contrôlée permet encore des performances.

La Maison Mieux Être de Charleroi (maisonmieuxetre.be) donne une fameuse aide aux personnes atteintes du cancer qui y trouvent écoute, activités et soins.

Que pouvez vous faire ?

Faire un don sur un des comptes ci joints pour les étourdis comme moi et si c'est déjà fait partager au maximum cet appel et cette page Facebook.

Promis c'est la dernière fois que je m'adresse à vous pour cela mais le jeu en vaut la chandelle et c'est avant tout pour cela que je marche.

Merci pour eux

A demain. Je vous aime

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 Jour 50 Trassilico - San Romano

Alors quand on est seul il faut être organisé. Quand on est trois, encore plus. Mais là, nous pouvons vraiment faire confiance à Pierre.

Il nous avait donc prévu un petit hôtel à Cardoso (dont le nom nous a fait rire Françoise et moi. Il n'y a vraiment pas de hasard). Nous sommes retournés ce matin à Trassilico pour revenir dans les environs de l'hôtel cette nuit. Et l'auto vous allez me dire! Elle a attendu sagement le retour de Pierre et Ginette qui ont marché avec moi jusqu'au sommet du mont Palodina (1170 m.) et m'ont laissé seul pour la descente de 1000 m. vers Cardoso où l'on s'était donné rendez vous. Arrivé à celui-ci, comme j'étais encore relativement en forme, j'ai décidé de monter les 300 m. vers San Romano pour alléger l'étape de demain. Malheureusement sur cette portion, le chemin était en piteux état, entravé de troncs, envahi d'orties et de ronces ce qui a ralenti ma grimpette. Mais elle ne sera plus à faire demain.

Et quel plaisir de partager cette expérience avec des amis, de se retrouver au soir autour d'un repas, de marcher ensemble dans cette magnifique nature que proposent les apennins toscans! On oublie la fatigue et les bobos. A propos de bobos, je rassure ceux qui s'en faisaient pour mon gros orteil droit. Dans les bagages de Pierre et Ginette se trouvaient mes vieilles godasses que mes pieds -et donc mon orteil droit- ont retrouvés avec plaisir. Un autre content est Jack qui peut laisser la moitié de sa cargaison dans l'hôtel ou l'auto.

Belle journée donc que nous comptons bien terminer autour d'un bon verre bien mérité. Nous le boirons à votre santé.

A demain. Je vous aime

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Jour 51 San Romano - Corsagna

On ne change pas une logique et une equipe qui fonctionnent bien.

C'est donc à trois que nous démarrons ce matin de San Romano avec l'idée de faire une partie du chemin ensemble avant de se séparer, moi pour continuer et eux pour reprendre la voiture et m'attendre à l'arrivée. Nous commençons par une solide montée sur du bitume où Pierre donne le tempo en tête. La montée continuera dans les bois sur une sterrata très agréable au milieu de châtaigniers. Après plus ou moins deux heures de marche, au moment de se séparer nous rencontrons un sympathique monsieur qui s'entretient avec nous de différentes choses comme la chasse, les pensions, son métier dans les fleurs ou Marcinelle où une série de toscans sont morts dans la catastrophe. En partant il nous invite même à passer chez lui si nous avons besoin de de quelque chose.

Ginette et Pierre font demi-tour et je continue ma route vers Borgo à Mozzano, lieu du rendez-vous. Pour eux comme pour moi, le plus dur est fait. Nous avons eu notre quota de dénivelé positif. Il ne nous reste presque plus qu'à descendre.

Ma descente se fait dans des plus petits chemins et très souvent au milieu des oliviers. C'est d'ailleurs dans un jardin d'oliviers que je m'arrête pour manger. Je n'ai pas le temps de déposer un Jack amaigri que je suis piqué par un taon sur la joue. Le premier juron qui me vient à l'esprit est "Judas".

Quelques kms plus loin, j'arrivais à Borgo à peu près en même temps que mes amis. Dans Borgo j'ai été frappé par des bancs en pierre qui proposent des maximes dont quelques-unes rejoignent bien l'esprit de mon pèlerinage.

Je retouve mes compères près du pont. Le temps de boire une bière ensemble et je repars pour une heure de montée que je ne devrai donc plus faire demain. C'est du village de Corsigna que nous prenons la route pour nous diriger vers notre hôtel où pour une fois je dispose d'un bain pour relaxer tous ces muscles bien sollicités.

A demain. Je vous aime.

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Jour 52 Corsagna - Petrognano

Il était 9h15 quand nous avons quitté le beau petit village de Corsagna pour une montée (et oui !) de quelques heures.

Il faut dire que nous avions bien profité de l'excellent buffet de l'hôtel où nous logions. Il n'empêche ces 500 m. de dénivelé il fallait aussi se les avaler comme les croissants du buffet. Qui plus est, le temps était couvert et les prévisions à la pluie. Nous nous étions armés de tout le matériel adéquat dont nous aurions eu besoin à peine 50 secondes. Vers 11 h. la montée terminée et le moment de se quitter étant venu, la pluie s'est mise à tomber le temps d'une photo. Et puis les kway rangés, nous sommes partis chacun de notre côté, Pierre et Ginette vers l'auto et moi vers Petrognano. La descente agréable la plupart de temps s'est montrée fort difficile sur une partie.

J'ai suivi un long moment une rivière sur un chemin bucolique. C'est le moment que Françoise a choisi pour reprendre contact. "Je suis contente que Ginette et Pierre soient avec toi cette semaine, dit- elle, Cela te fait de la compagnie".

"Je suis content aussi, lui répondis-je. J'ai expliqué à Ginette notre nouvelle relation, la façon dont tu me contactes par des signes et l'implication que tu as toujours dans mes décisions quand je te demande conseil".

"C'est vraiment chouette qu'ils soient venus." finit-elle.

Entre-temps, le paysage changeait et après un dernière montée à la sortie du bois je me suis retrouvé devant le paysage de la plaine Toscane. Finis les gros dénivelés, les descentes périlleuses et le cœur qui monte à 120.

A partir de demain et jusque Assise les seules pentesques j'aurai à affronter seront celles des collines habillées d'oliviers ou de cyprès.

Je dis cela mais elles vont me manquer ces montagnes que je cotoye depuis le Jura."A moi aussi!" me glisse Grizzly. "Qui est perdu ?", demande l'étourdi.

"Ton cerveau", répond Benaless.

"Bon les gars ! Si on profitait de notre hôtel ?" m'esclamais-je d'une voix forte pour interrompre la discussion.

Sur ce...

A demain. Je vous aime

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Jour 53 Petrognano - Montecarlo

Ce matin c'est seul que je démarre de Petrognano vers Montecarlo. En effet, nous avions décidé hier soir en comité restreint de consacrer notre après-midi au tourisme.

Je trouvais dommage de passer près de belles villes toscanes réputées sans au moins en visiter une. Comme nous n'étions pas loin de Lucca nous avons choisi d'y passer l'après-midi .

Mais ce petit détour touristique il fallait le mériter. Or ce matin si l'étape n'était ni longue ni difficile, il y avait un nouvel invité: l'orage. Cette fois, j'ai eu droit à la douche ou plutôt aux douches. Jack bien emmitouflé sous sa cape jaune c'est Freddy et Lapin qui rouspétaient chaque fois que je les consultais. Visiblement ils n'aiment pas l'eau.

Heureusement les chemins n'ont plus rien à voir avec les sentiers montagneux qui manquent déjà à Grizzly. Ils se faufilent entre les oliviers et les grosses propriétés toscanes. Ils s'élancent joyeux entre deux rangées de cyprès. Ils traversent joyeux les vignes déjà debarassées de leurs grappes.

J'ai eu juste quelques centaines de mètres difficiles entre deux chemins.

Arrivé à Montecarlo où le restant de l'équipe m'attendait, j'ai juste changé de T-Shirt et nous partions pour Lucca.

De chaque côté, nos enfants nous avaient recommandé cette ville et nous n'avons pas été déçu de ce que nous avons visité: la cathédrale Saint-Martin, l'église Saint-Prediano, l'église Saint-Michel, la place Napoléon, la place amphithéâtre où nous avons mangé avant de nous diriger vers l'hôtel de ce jour. Merci encore à Ginette et Pierre de me gâter ainsi et de me permettre de recharger mes batteries avant les 20 derniers jours.

A demain. Je vous aime

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Jour 54 Montecarlo - Fuccechio

Nous partons guillerets de Montecarlo malgré la menace d'orage, sûrs de notre fait avec un premier Tau bien visible. Je ne verrai le deuxième que 14 km plus loin. Mais reprenons.

Nous partons guillemets de Montecarlo. Le road book nous dit de descendre par la nationale jusque Marginone (2,5 km), village que je ne verrai jamais.

Est-ce le fait d'avoir dû nous préparer à l'orage. Est ce la panne de satellite de Freddy? Est-ce notre trop grande confiance ? Ou les 3 ? Toujours est-il que nous nous retrouvons à San Piero, 5 km sur la gauche de Marginone.

Nous décidons alors de faire appel à Lapin pour retrouver le chemin d'Assise pour moi et celui du retour à Montecarlo pour Ginette et Pierre. Direction donc Vione où nous devions nous séparer après 10 km. Ce sera après 13 et après de longs moments au bord d'une route nationale sans trottoir où nous serons rasés par voitures et camions. Enfin nous y sommes arrivés entiers et prenons chacun notre route. Si l'orage s'est éloigné pour moi, l'air demeure très chaud et je dois boire beaucoup. Heureusement j'ai deux gourdes.

"Deux gourdes, es-tu sûr Phil ?", demande Benaless

"Oh m... reprend l'étourdi, il y ena une qui est restée dans l'auto."

Et bien on fera sans. Mais c'est qu'il faisait vraiment chaud sur les routes en bitume de vers Ficcechio. Dès ma gourde vide, je sonnai à une porte. En voyant un pèlerin ces braves gens voulaient m'inviter à table boire un café alors qu'ils prenaient le repas. Je me suis excusé avant de repartir la gourde pleine et le cœur ragaillardi par cette gentillesse spontanée.

Plus loin c'est dans un cimetière que j'ai fait provision d'eau. Il y a toujours de l'eau dans un cimetière. Enfin à quelques km de l'arrivée, c'est mon gosier que j'ai rafraîchis grâce à un demi de bière italienne à 2 euros.

Il me restait quelques encablures (5 km quand même) pour atteindre notre lieu de rendez-vous avant d'aller à l'hôtel d'où je vous écrit dans un bain à bulles??‍?️? bien mérité après ces 32 km.

A demain. Je vous aime

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Jour 55 Fuccechio - Coiano

C'est fou ce qu'une petite chose peut changer une journée. Ce matin, au départ de Fuccechio, Pierre se plaignait d'une cloche attrapée le premier jour par un mauvais choix de chaussettes et qui, malgré me "compeed", continuait à lui faire mal. Après un quart d'heure de marche, il a dû se résoudre à abandonner.

D'où nouvelle organisation de la journée. Ginette se sentant bien se propose de faire étape avec moi et Pierre nous donne rendez-vous au milieu de celle-ci à San Miniato Alto.

Nous y arriverons 2h30 plus tard complètement trempés. L'orage violent qu'on nous annonçait pour la journée nous aura surpris dans la dernière ligne droite entre San Miniato Basso et Alto.

Nous avons trouvé refuge dans un petit café place Bonaparte où nous aurons laissé quelques auréoles au sol avec toutes nos excuses. Le petit chemin emprunté le matin était pourtant fort sympathique mais contre le temps...

A peine séchés avec quand même encore de l'eau dans les godasses nous avons repris la route vers Coiano. De temps en temps le soleil faisait une courte apparition bien nécessaire pour nous réchauffer. Tout l'après-midi nous avons suivi la Via Francigena, d'abord sur de petites routes ,ensuite sur ces fameux chemins de terre qui traversent oliveraies et vignes. Encore une fois j'ai pu partager ce plaisir de se balader dans un tel environnement. Les collines tout en rondeurs proposent une gamme infinie de verts encore plus remarquable après la pluie. Les villas ou villages qui s'y aggri1pent se détachent par leurs couleurs vives et le ciel, dans ses noir, blanc et bleu mélangés, achève le tableau. C'est dommage que les photos ne rendent pas cet instantané.

Toujours est il que nous sommes arrivés à bon port ayant gaiement fait nos 20 kms du jour. Le prochain jour c'est...

A demain. Je vous aime.

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Jour 56 Coiano - Gambasi terme

Jamais je ne saurai comment remercier Ginette et Pierre de cette magnifique semaine passée en leur compagnie. Plus encore que les beaux hôtels où nous sommes descendus, que les excellents repas avalés, que les doux apéros sirotés, c'est leur présence bienveillante, leur attention de tous les instants et surtout nos échanges qui ont participé à la réussite de ces quelques jours. Cela a été pour moi un coup de boost physique et moral considérable. Mais toute bonne chose à une fin et ce matin je me remets sur en marche vers Gambassi et eux vers leurs occupations familiales et autres.

De Coiano où nous nous séparons à Gambassi, le chemin d'Assise est commun avec la Via Francigena. Le soleil est à nouveau de la partie et il réchauffe les collines arrondies de ce coin qui abandonné parfois les vignes et les oliviers pour faire place à l'agriculture. Etant donné que nous sommes dimanche et qu'il fait beau, je rencontre quelques promeneurs, des joggeurs ou des adeptes de VTT. Ce qui fait dire à Bill: "Hier sous l'orage, on ne voyait personne."

Des coups de feu répétés annoncent que la chasse est ouverte et les deux chasseurs que j'ai rencontrés n'ont pas ri quand j'ai levé les mains en l'air.

Ce sera seulement à la fin de l'étape, 15 kms plus loin que j'emprunterai une route nationale et encore à l'abri du parapet sinon j'avais usé mes godasses sur des chemins de terre ou des sterratas bien agréables à suivre et sans grande montée ni descente.

J'attends en vous écrivant l'ouverture d'un refuge spécial pèlerins aménagé derrière une vieille église du 12e siècle où je passerai la nuit.

A demain. Je vous aime.

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Jour 57 Gambassi terme - San Gimignano

Arrivé tôt hier, j'ai été me promener à Gambassi pour vous envoyer quelques photos. Depuis hier, je dois faire face à une nouvelle difficulté: Jack a repris du poids. Il est en dépression. Je n'ai jamais été habitué à gérer la dépression d'un sac à dos. Toujours est-il que cela a des répercussions sur mes épaules. Il se laisse aller. Je vais tenter de le délester de temps en temps d'une pomme ou d'une banane. Ça le motivera.

Hier soir dans le magnifique bâtiment rénové et aménagé pour les pèlerins à côté d'une église splendide du 12e s., nous étions 21 à souper, des anglais, des hollandais, des italiens, des français et une famille de belges francophones de Court-Saint-Étienne bien sympathiques. Ce sont les parents qui sont partis le 14 juillet de Champagne pour faire la Via Francigena. Les enfants (adultes) sont venus les rejoindre pour une semaine.

Comme la météo est à la pluie, je décide de partir tôt même si l'étape n'est pas trop longue. Dès la sortie de Gambassi nous entrons dans les vignes des Chianti avec régulièrement des invitations à goûter ce qui provoque un nouveau colloque

Bill: On irait bien goûter
Phil: A 8h30 du matin c'est un peu tôt
Bill: Tu n'as pas toujours dit cela
Phil: c'était à 20 ans. J'ai mûri quand même
Françoise: Bof
Phil: Comment bof ?
Françoise: Je plaisantais, mon cœur..
Benaless: Faudrait pas perdre le nord
Phil: C'est plein sud que l'on va, au sud
Benaless: Je disais cela pour que tu écoutes Freddy.
Et il n'y avait pas besoin de faire attention à Freddy. Durant de longs kms, nous avons suivi des chemins de terre à travers vignes et oliveraies. Le temps restait instable mais sans pluie.

Durant cette matinée je suis passé à Pancole, lieu d'une apparition de la Vierge et près d'un magnifique monastère qui invitait à la prière et à la méditation.

Je suis finalement arrivé assez vite à San Gimignano malgré une étape plus dure qu'elle ne passait sur papier. Ces petites collines rondes de Toscane il faut aussi les grimper et les descendre, ce que j'ai fait durant 17 km.

Après un court repos je me propose d'aller visiter la ville.

A demain. Je vous aime.

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Jour 58 San Gimignano - Abbadia a Isola

J'ai donc profité de cette superbe ville qu'est San Gimignano hier tout l'après-midi. J'ai eu du mal à avoir Grizzly avec nous mais je lui ai fait comprendre qu'il lui est impossible de rester dans la chambre d'hôtel seul. Tout au plus peut-il commencer son hibernation dans un coin de mon cerveau. Lui c'est la foule qui l'ennuie. Or dans ce haut lieu touristique, ce n'était pas le monde qui manquait. J'ai donc visité cette ville et son musée d'arts sacrés où j'ai admiré un magnifique Christ en croix habillé en bois polychrome. Toutes les rues valaient la peine d'être vues. J'ai même poussé la chansonnette avec un joueur d'harmonica de rue.

Ce matin, avec le beau temps j'étais bien décidé à avancer dans les kms. C'est comme un cheval. Plus il se rapproche de son box plus il accélère. J'ai maintenant envie d'être à Assise et de visiter les hauts lieux de la vie de St-François.

Et puis en marchant j'ai dépassé une belge de Wervik, Karliien que j'avais déjà rencontré le jour précédent. Nous avons fait route ensemble. Comme je n'avais pas trouvé de logement pour la nuit, j'ai continué sur la Via Francigena avec elle jusqu'à un refuge paroissial où nous allons passer la nuit avec d'autres pèlerins. Demain je devrai retrouver le chemin d'Assise.

Belle journée ensoleillée sur de beaux chemins. Espérons que les autres jours seront aussi positifs.

25 kms au compteur.

A demain. Je vous aime.

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Jour 59 Abbadia da Isola - Sienne

Nous étions 5 à loger dans cette ancienne abbaye, trois italiens qui font une semaine sur la Via Francigena, Karliien et moi. Nous avons vécu la particularité de prendre nos repas dans une chapelle.

En calculant les deux itinéraires à partir de cet endroit, je remarque qu'ils sont à peu près identiques au point de vue distance, qu'ils se rejoignent une nouvelle fois dans +/- 50 km mais que la Via Francigena me permet de visiter Sienne. Je décide donc de suivre cette voie d'autant plus qu'elle me permet de marcher avec Karliien qui a le même rythme que moi et avec qui je m'entends bien. Elle est partie début juin d'Arras pour rejoindre Rome en retournant seulement une semaine près de son mari. Chapeau.

Nous démarrons donc ce matin de Abbadia da Isola pour nous diriger vers la toute proche ville fortifiée de Monterigione.

Nous y arrivons après une belle côte et là, surprise ! La ville fortifiée est juste un petit village avec une place et quelques maisons mais des murailles énormes qui l'entourent et qui font l'objet actuellement de rénovation. Cette fortification avait été construite par la ville de Sienne pour se defendre des Florentins. Nous y buvons un café et mangeons un croissant, le déjeuner de ce matin ayant été, comment dire ?, un peu juste.

Ensuite direction Sienne en passant par de beaux petits villages et des chemins assez faciles et hors circulation. Heureusement car nous avons 25 km à faire. Comme toutes les villes importantes de la région, Sienne se trouve sur une colline que nous devons grimpée en fin de parcours avec une pente à 18 %. Au dessus de la pente, nous sommes à l'entrée de la ville que nous devons traverser presque entièrement pour arriver chez les sœurs de la charité qui nous hébergent aujourd'hui. Juste le temps de prendre une photo de la place du Campo avant de vous écrire et de sortir visiter la ville.

A demain. Je vous aime.

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Jour 60 Sienne - Ponte d'arbia

On dit souvent que l'Italie est un musée à ciel ouvert. Quand on se trouve dans le centre historique des grandes villes italiennes on ne peut qu'être d'accord avec cela. Hier à Sienne on ne savait où donner des yeux. Et puis cette place du Campo a un cachet et une athmosphère que je n'ai trouvé nulle part ailleurs si ce n'est sur la place de l'amphithéâtre de Lucca. Nous avons donc profité, Karliien et moi, de la ville et puis d'un restaurant puisque les sœurs de la charité ne nous proposaient que le déjeuner. Nous y avons retrouvé deux australiens qui font aussi la Via Francigena.

Le petit déjeuner léger et biscotté nous le prenons à 7 h. pour partir le plus vite comme 26 kms nous attendent jusque Ponte d'arbia. Cette étape était notée comme une des plus belles au point de vue paysages. Si c'est vrai que les paysages sont très beaux les couleurs de cette fin d'été ne les mettent pas en valeur. Le gris-brun des terres retournées récemment ne remplacent pas avantageusement les verts et jaunes des cultures du printemps.

Mais nous avançons sans trop de difficulté sur ces beaux chemins, la chaleur d'un grand soleil étant atténuée par un gentil petit vent frais.

C'est donc peu avant 15 h. que nous arrivons au refuge Cresti en même temps qu'un groupe de 12 Toulousains commencant une semaine vers Assise, qu'une jeune Hollandaise et que plusieurs Italiens. La soirée s'annonce animée dans le petit resto du village où nous allons tous nous retrouver puisque le refuge ne fait pas le souper.

A demain. Je vous aime

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Jour 61 Ponte d'Arbia - San Quirico d'Orcia

Dans un périple comme celui-ci il est important de bien se reposer. J'ai donc été rassuré lorsque le responsable du refuge m'a emmené dans une petite chambre à deux lits. Il m'a annoncé quand même que j'aurais un compagnon de chambrée. En m'installant, j'ai remarqué que notre fenêtre donnait sur le route nationale assez fréquentée. Cela devrait aller me dis-je. Quand je suis revenu après le souper que j'ai partagé avec Karliien et Lieke, une jeune hollandaise, j'ai vu que quelqu'un avait installé ses affaires mais personne dans la chambre.

Je me mets au lit et une heure plus tard entre un homme qui me réveille en se couchant et qui 2 minutes à peine après s'endort. C'est là que ma nuit a pris une autre direction. Je connais les ronfleurs. Je le suis parfois aussi mais jamais je n'avais été en présence d'un tel phénomène. Le bruit partait des profondeurs de son corps pour s'amplifier à la sortie et par la bouche et le nez réunis donner toute sa puissance dans un magistral "pfuff" suivi directement de la respiration énorme qui donne le fameux "ron". Une œuvre d'art mais désastreuse. Françoise me dit qu'elle n'a jamais entendu pareille chose. Grizzly lui est adminiratif.

Bill, quant à lui, n'arrête pas de siffler comme De funes dans la grande vadrouille. Moi, effrayé par la nuit qui m'attend, je tente par tous les moyens de me boucher les oreilles avec mon coussin. Heureusement le bruit prend un peu plus tard son rythme naturel et se transforme en locomotive. Dans un train on arrive à dormir.

5 h. Les camions commencent leurs allers et retours sur la nationale. Décidément il est dit que je ne dormirai pas ce jour.

Alors debout. Je vous décris ma nuit et je fais mon sac. La vie appartient à ceux qui se lèvent tôt. Nous avons décidé, Karliien et moi de déjeuner à 7 h. au bar d'en face avant de prendre la route.

Nous la prenons sous un soleil levant mais avec un petit air frais d'arrière saison. Le chemin est encore une fois splendide. Il nous entraîne à travers les vignes de Montalcino où nous craquons vers 11 h. au " Pelgrims break": un verre de vin, une bouteille de 50 cl d'eau et un sandwich que nous prenons dans un tonneau. Le vin est délicieux. Le reste je ne sais plus.?. Nous redémarrons assez rapidement car l'étape du jour nous emmène à San Quirico d'Orcia une superbe vieille ville que nous comptons bien visiter après nous être installés dans le refuge "Il pellegrino où j'espère ne pas voir arriver mon "copain" de cette nuit.

A demain. Je vous aime.

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Jour 62 San Quirico d'Orcia - Montepulciano

Si vous devez venir en Toscane un jour, en plus des grandes villes qui en font la réputation, arrêtez-vous aussi dans de petites villes ou villages moins connus. Ils peuvent avoir parfois autant voire plus de charme.

San Quirico d'Orcia est de ces bonnes surprises.

Nous avons eu la chance de pouvoir passer l'après-midi dans ses petites rues, ses églises, ses jardins et le long de ses fortifications. J'ai pu y goûter à une extraordinaire glace aux noisettes du Piemont et au praliné croquant et nous avons profité dans un restaurant du menu pèlerin (excellent) à 15 euros.

J'ai quand même eu un stress au moment de m'inscrire au refuge où nous dormions. J'ai remarqué que la personne qui me suivait dans la file était le ronfleur d'hier. Moment de panique: Allait-il partager ma chambre ?

Ouf ! Les deux personnes qui dormaient avec moi étaient J&J ou James and John deux anglais. James est parti de Norwich le 4 juillet et son ami John est venu le rejoindre pour une semaine.

Ce matin nous avons pris chacun notre chemin, Karliien et moi, elle vers Rome et moi vers Assise en nous promettant de nous revoir.

C'est donc seul que je repars le long du val d'Orcia, inscrit au patrimoine mondial par l'Unesco. A un moment nous croisons une biche. Grizzly me dit de la faire fuir vers les bois car nous avions plus loin vu des chasseurs en embuscade. Je commence une danse Saint-Guy avec mes bâtons et elle s'enfuit à toute allure loin des chasseurs. Gagné pour cette fois.

Je passe par de magnifiques villages perchés, Pienza, Montichiello mais qui dit perchés dit... montées.

Les jambes en prennent un coup surtout que Montepulciano qui devait être mon point final est situé au sommet d'une colline mais s'étend sur des kilomètres. C'est aussi une ville à voir avec ses petites ruelles et sa Via Nobile qui mène à la basilique San Bagio et qui est bordée d'autant de cyprès que de soldats, originaires du coin, morts aux champs d'honneur durant la grande guerre.

C'est donc après 27 kms et sous la pluie qui menaçait depuis ce matin que j'arrive dans l'agruturismo qui m'abrite ce soir.

J'y suis reçu en français avec une grande bière d'accueil.

A demain. Je vous aime

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Jour 63 Montepulciano - Chuisi scalo

Dimanche 8 h. du matin, j'ai rendez vous avec Monique la patronne de l'agriturismo Merita pour régler ma note et recevoir le poinçon de ma crédentiale. Hier soir, désolée de ne pas avoir pu me faire à souper (ils sortaient avec des amis) elle avait rempli mon frigo de bonnes choses pour me régaler et ce matin elle me propose de me ramener en voiture jusqu'au chemin d'Assise situé à presque 3 km de là. Je dois dire que cela m'arrange car le ciel est gris et le temps est à la pluie.

Quand elle me dépose, je m'aperçois qu'elle m'a fait gagner quelques km de plus au grand plaisir de mes cuisses qui ont eu du mal à se remettre des côtes d'hier.

Durant plus de 13 km, je vais suivre le sentiero della Bonifica qui me fera passer au bord de plusieurs lacs et le long de ruisseaux et canaux aux eaux brunies par les alluvions charriées par les pluies incessantes de la soirée et de la nuit d'hier.

Cette végétation originale me donnera l'occasion de rencontrer un nombre impressionnant d'oiseaux, des oiseaux d'eau comme le héron, les aigrettes, les colverts ou les sarcelles à toute une série de passereaux. Je verrai aussi quelques cervidés et des ragondins qui profitent du calme pour sortir de leur terrier et profiter du nouvel apport d'eau.

Le seul ennui de ce long sentier c'est qu'il est composé de petits graviers qui s'invitent dans les godasses et m'obligent à quelques arrêts pour m'en débarrasser.

Comme le chemin est tout a fait plat, j'arrive avant midi à Chuisi Scalo où il est prévu que je loge.

Demain je rentre en Ombrie où il me restera 4 longues étapes. Cet après-midi de repos est donc bienvenue.

A demain. Je vous aime

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Jour 64 Chuisi scalo - Tavernelle

Six heures du mat dans la gare de Chuisi scalo

Derrière son bar la jolie bimbo

Surveille d'un oeil ce drôle de coco

Qui à sa table parle tout haut.

 

En fait je suis juste en train d'expliquer à mes petites voix intérieures la nécessité de se lever tôt. Hier la pluie est tombée drue durant plus de six heures avec des éclairs et du tonnerre. Les rues étaient des ruisseaux lorsque je suis sorti du petit resto où j'ai soupé. C'est Grizzly qui est le plus difficile à convaincre. Il aime trop dormir.

Je profite donc du calme relatif du ciel pour démarrer après ce petit déjeuner pris au buffet de la gare. Jusque Moiano le chemin suit un canal, lieu de rendez-vous des cerfs et des biches.

J'en vois au moins une dizaine et j'en capturé deux pour vous (en photo je vous rassure). Le brouillard tarde à se lever mais je traverse durant la matinée de beaux petits villages comme Paciano et Panicale. Entre les deux sur mon Road book on me vante une vue sur le lac Trasimène où St-François passa un carême seul sur l'île majeure. J'ai pris une photo des bancs car c'est tout ce qu'on voit. Je ne vais pas attendre 40 jours pour vous faire une autre photo. Par contre 40 min plus tard à l'entrée de Panicale, le brouillard se lève un peu et je peux vous offrir un autre cliché. Partout sur les routes et les chemins les signes de l'orage d'hier sont visibles.

Après Panicale il me reste 11 km pour rejoindre Tavernelle mon étape du jour.

Le chemin s'élève dans les oliviers. Est-ce la fatigue accumulée ? Est-ce le but qui approche ? Est-ce ce temps qui ne veut pas se relever ? Toujours est-il qu'à un moment les larmes me montent aux yeux et déversent à leurs tours des torrents sur mes joues. Le manque physique de Françoise se fait ressentir au plus profond de mon être. Bien sûr je sais qu'elle est entrée dans la Vraie Vie.

Bien sûr je sais qu'elle y est heureuse. Bien sûr je la remercie de me faire régulièrement des signes mais aujourd'hui, à ce moment j'aurais voulu la tenir par la main pour l'emmener vers Assise. Je m'assied au bord de la route et laisse le flot de larmes libérer mon cœur. Une vieille dame passe avec son chien et me demande "Tutti va bene, signor?". Je lui réponds: " Si tutti va bene". Elle s'éloigne étonnée. Comment lui expliquer que mon cœur est en même temps brisé et rayonnant, que je pleure autant de joie de la savoir heureuse que de ma peine d'être sans elle?

Je reste là un instant et puis cette petite voix que je connais bien me glisse à l'oreille: "Continue ton chemin mon coeur. Je suis avec toi. Je suis dans les parenthèses de tes textes. Je suis la rime qui termine tes poèmes. Je suis dans les yeux admiratifs de tes petits-enfants et dans les encouragements de tes amis. Sois dans la joie et vis ta vie."

Je me suis relevé, étouffant mes sanglots et j'ai continué le chemin que j'aurais voulu faire avec elle main dans la main mais que je fais autrement.

Les derniers kilomètres ont été plus légers. Ils m'ont emmené dans un local paroissial à la limite de l'insalubrité où la douche est froide et à écoper à la fin. Retour dans la vie.

A demain. Je vous aime.

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Jour 65 Tavernelle - San Enea

Françoise: Comment va ton rein droit ce matin ?

Phil: Comment sais.. Oh oui suis-je bête ?

Benaless: Tu oublies que l'on est dans ta tête!

Bill: Et si tu répondais à la question ?

Phil: Cela va mieux. Ça m'a pris hier soir. Je me demande comment je vais porter mon sac.

L'étourdi: Ben sur ton dos!

Grizzly: De toute façon on ne va pas rester ici. Andiamo!

Et je suis parti légèrement courbé sur les routes d'Ombrie. Encore une belle étape aujourd'hui. Je compte sur Freddy, Lapin et Benaless pour ne pas faire des kms de trop et sur Jack pour se faire le plus léger possible.

Ce qui ne sera pas léger, ce sont mes godasses qui dans les chemins de terre détrempés s'ornent de kilo de gadoue qu'il faut éliminer au fur et à mesure. Les 11 premiers kms se passent assez bien; cependant ensuite, le découragement me gagne. Les paysages ne sont pas aussi beaux. Mon dos me fait mal. Mes chaussures et mes jambes sont lourdes.

Je vois un supermarché. J'y entre pour acheter de quoi manger ce soir puisque la paroisse qui nous accueille a une cuisine. A la sortie, surprise: un autre pèlerin, Loïc, parisien qui termine aussi son voyage vers Assise.

Tout de suite le moral remonte. Nous discutons de notre chemin, de nos étapes préférées, de nos vies et j'en oublie mon dos et mon ras le bol.

Comme quoi le "chemin" c'est comme la vie. On passe de la tristesse à la joie, du découragement à l'enthousiasme, de l'optimisme au pessimisme.

En montant une crête qui donne vue sur Pérouse et nous arrivons à St-Enea où l'appartement paroissial et l'accueil sont 5 étoiles. De la nourriture nous attend. A nous de la cuisiner.

A demain. Je vous aime.

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Jour 66 San Enea - Torgiano

Dans cette expérience de vie, je retiendrai surement la gentillesse et l'accueil dont font preuve la plupart des hôtes des paroisses. Hier soir c'est avec un paquet de nourriture que nous avons été reçus par Nicoletta qui nous a laissé son numéro.. au cas où.

Ce matin, grâce à vos encouragements, grâce à un bon lit, grâce à un excellent souper partagé et surtout grâce à un patch de voltaren bien placé, c'est sans douleur que je me mets en route pour une courte étape qui doit m'amener à 20 kms d'Assise. Le temps est grisâtre mais on n'annonce pas de pluie.

Sur la route facile et plate que nous empruntons (je marche avec Loïc), pas grand chose à photographier. Les paysages ne sont plus si typiques. Nous traversons des champs labourés et le soleil tarde à pointer son nez.

Sans s'en apercevoir nous sommes déjà à la moitié de l'étape et décidons de nous offrir un café. Histoire de passer le temps car il nous reste 6 petits kms à faire.

Ils seront faits en 1h30 pour arriver à Torgiano d'où nous pouvons, dans le brouillard, apercevoir Assise et le mont Subasio.

Il y a un marché. Nous nous achetons de la viande et des légumes pour cuisiner ce soir. Nous arrivons à l'accueil paroissial encore une fois très sympa avec Rita pour, ensuite, nous apercevoir qu'il n'y a que des lits et une douche. Donc pas de cuisine. Je garderai donc les légumes pour demain. C'est Jack qui va être content.?. Par contre ce qu'il y a en grand nombre ce sont des moustiques. Cela me promet une belle nuit.

A demain. Je vous aime.

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Jour 67 Torgiano - Assisi

Il y a un quart d'heure que je relis ce titre Torgiano-Assisi. Je reste hébété sur le lit de ma chambre chez les soeurs franciscaines d'Emmaus. Je suis à Assise. J'ai parcouru plus de 1.300 kms à pied pour arriver ici. J'ai le même regard hagard qu'un étudiant de Louvain-la-Neuve sortant d'un pot d'accueil.

Mais revenons à notre journée. Nous nous sommes quittés hier avec l'accueil 5 étoiles de Rita dans la petite paroisse de Santa Croce proche de Torgiano.

Nous y avons soupé (toujours avec Loïc) dans un petit restaurant juste accolé à l'église et nous y avons pris le petit déjeuner ce matin après une bonne nuit réparatrice pour moi, moins pour Loïc victime de mes ronflements.

Nous avons démarré cette dernière étape sous les rouspétances de Jack à qui j'avais donné les légumes achetés hier au marché. Je lui ai dit: "Jack, c'est ton dernier jour. Jusqu'à notre retour en Belgique tu seras tranquille dans ta chambre".

Étape assez facile composée de routes bitumées mais assez plates au début, avec vue sur le village de Bettona en hauteur et composée ensuite d'un sentier forestier qui, traversant la ville de Bastia Umbra, nous emmène direct vers Assise. Nous faisons une petite halte dans cette ville qui fête en grande pompe Saint-Michel, patron de la ville.

Un peu avant Assise, Loïc prendra la route de Sainte-Marie des anges où se trouve son logement et la basilique Sainte-Claire. Rendez-vous est pris pour une petite bouffe ensemble demain à Assise.

Depuis le début de la matinée nous apercevons Assise mais le temps à l'orage nous empêche de faire des photos convenables. Et puis un peu après le départ de Loïc voilà que le soleil perce enfin éclairant la basilique de Saint-François. C'est comme si François me disait: "Tu viens pour moi, mon ami. Sois le bienvenu". Une forte émotion monte dans mes tripes. Tous ces kilomètres, tous ces efforts, toutes ces douleurs dites ou cachées mais aussi toutes ces rencontres, tous ces accueils, tous vos encouragements et vos mots gentils, tous ces colloques avec mes voix intérieures. Tout cela s'accumule dans ma tête et me font monter les larmes aux yeux. Je sens le besoin de partager avec mes proches le fait que JE L'AI FAIT. J'y suis arrivé et, pourquoi le nier ?, je suis fier de moi. Je remercie Françoise d'avoir fait le voyage avec moi et son silence en dit long aussi sur son émotion. Je la sais fière de moi.. Je suis super heureux pour les deux associations que je défends et vous rappelle qu'il est toujours possible de les aider. Je continuerai jusqu'au 6 octobre à vous informer de ma visite d'Assise mais je tiens à vous remercier encore de m'avoir suivi dans cette aventure, de vos encouragements et commentaires.

Plus que jamais, je vous aime. A demain

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Jour 68 Assise

Il est 6h30 quand je pointe le nez à l'extérieur de mon joli petit nid loué aux sœurs franciscaines d'Emmaus.

Je crois que je vais devoir réapprivoiser mon sommeil ou pourquoi pas avancer l'heure de mon coucher pour profiter comme je l'ai fait pendant deux mois des premières lueurs de l'aube.

J'ai besoin de marcher, de digérer l'évènement qui s'est produit hier: la fin de mon pèlerinage. Je me suis couché les yeux humides de tous vos messages de félicitations mais surtout d'affection. C'est un bonheur pour un être humain de recevoir ce genre de cadeau et j'en profite pleinement. Je pars au hasard dans cette splendide ville (où je suis dérangé par le côté mercantile inhérent à toutes les villes "saintes") mais comme vous savez que le hasard fait souvent bien les choses, je me retrouve dans la basilique Ste-Claire (qui se trouve bien à Assise, erreur d'hier) devant le fameux crucifix qui a attiré St-François à San Damiano. Ce crucifix m'accompagne depuis toujours sous forme d'un papier où est inscrite la prière attribuée à St-François et, durant ce voyage, j'ai reçu en cadeau de Michael, le pèlerin hollandais avec qui j'ai marché quelques jours une version miniature en bois de cette œuvre. Je profite de l'instant pour un moment de méditation et de merci à tous mes hôtes de ces derniers mois. Gentils comme voleurs, ils ont fait partie de mon voyage. Je vous rends aussi présents vous tous mes amis ainsi que les personnes que vous m'avez confiées.

Et puis je récite cette si belle prière qui à elle seule représente un chemin de simplicité: Seigneur, faites de moi un instrument de votre paix, là...

Reviennent alors à moi tous ces bons moments passé avec le Groupe Saint-François, les Compagnons du Collège où tout simplement en couple ou en famille où ces paroles ont résonnés.

La suite de la matinée sera consacrée à d'autres visites dont la superbe église San Pietro et celle de Ste-Marie majeure où est exposé le corps intact d'un jeune adolescent, Carlo Acutis décédé d'une leucémie et proclamé bienheureux. Je ne connaissais pas l'histoire de ce jeune homme mais les explications d'internes me donnent envie de retourner une fois sur sa tombe avant de revenir.

Mais il y a tant de choses à voir. Ce midi j'ai dîné avec Loïc venu faire connaissance avec la ville de St-François.

A demain. Je vous aime.

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Jour 69 Assise

Comme il est bon de se promener dans une si belle ville au passé si riche. En attendant l'arrivée de ma fille Marie qui me rejoint demain, je traverse cette superbe cité de part en part pour repérer ce qu'il y aura à visiter ensemble.

C'est malheureusement la pluie qui m'oblige parfois à me réfugier dans les églises. J'aime particulièrement celle de San Pietro qui est restée sobre et donc le crucifix pendu sous le dôme invite à la méditation.

Et puis, après avoir questionné internet sur la vie de ce jeune Carlo Acutis, j'éprouve le besoin d'aller me recueillir sur sa tombe. D'habitude je ne suis pas friand de toutes les manifestations autour des reliques d'un Saint. J'estime que celui ou celle-ci n'a pas besoin de cela pour nous faire profiter de son aura; cependant ce jeune adolescent endormi dans son cercueil de verre a quelque chose d'émouvant et de singulier. Je pense à tous les élèves que j'ai vu passer durant ma carrière de prof et d'éducateur.

Comme il fait mauvais, je me dis que le tombeau de St-François aura moins de succès. Bien vu. Les deux basiliques (inférieure et supérieure) sont presque vides d'autant plus qu'on y prépare les célébrations de la fête de St-François ce 4 octobre. J'en profite pour les visiter à mon aise et pour aller chercher mon testimonium, preuve de mon pèlerinage. C'est juste un papier mais il atteste des efforts consentis.

Ce matin je monte jusqu'au Roccia majore, château surplombant la ville d'Assise et tente de prendre des photos panoramiques malgré le mauvais temps qui décidément s'incruste sur Assise depuis que j'y suis.

A demain. Je vous aime

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Jour 70 Assise

Ce matin, j'attends Marie, ma fille. Je suis un peu triste pour elle car au départ elle venait pour m'accueillir et avec mon désir d'arriver, c'est moi qui la reçoit. Mais ce qui importe c'est le plaisir de la serrer dans mes bras et, par elle, serrer toute cette magnifique tribu dont je suis à la tête et dont je suis si fier. Elle arrive avec ma soeur Chantal qui profite de cette occasion pour visiter Pérouse et venir me féliciter en direct. Vous devinerez que je suis 2 h. à l'avance à la gare située à 3 km du centre à côté de Ste-Marie des Anges, ce qui me permet de visiter ce bâtiment contenant la portioncule, chapelle reconstruite par François et l'endroit où il est décédé en 1223. Une messe commence et l'église se remplit (Hé oui cela existe encore). Je décide d'y rester mais peu après l'entrée du cortège de tous les celebrants, je préfère sortir et aller boire un bon capuccino avec Loïc qui repart en France demain.

Hier j'ai profité de mon après-midi pour faire quelques musées (ceux qui sont gratuits, ma bourse ayant un mystérieux trou) et me promener dans les rues où j'ai été photographié avec un pèlerin un peu plus statique que moi.

Aujourd'hui donc voici une de mes sœurs et une de mes filles. Je leur montre la basilique St-François, la place municipale et après un apéro et un dîner, Chantal s'en retournant à Pérouse, nous continuons notre visite de la ville avec aussi une comparaison des aperols spritz.??

A demain. Je vous aime

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Jour 71 Assise

Les fêtes et cérémonies pour la fête de St-François (rappelons le St patron de l'Italie) ont débuté hier soir par une fête médiévale sur la place devant la basilique. Des danseurs, musiciens, lanceurs de drapeaux et mangeurs de feu se sont succédés en habits d'époque sous les regards d'une foule nombreuse qui appréciait aussi les ripailles gratuites, vins, brochettes, poissons fruits ou autres porchettas.

Avant cela nous avions profité d'un merveilleux coucher de soleil après une longue promenade dans les rues de la ville.

Ce matin: réveil 9 h. Incroyable! Cela ne m'était plus arrivé depuis des mois. C'est Grizzly qui était content tandis que Jack poursuit dans son coin sa semaine de vacances.

Avec Marie, nous sommes montés (par un long sentier qui nous élève de 400 m. en 1h30) à l'ermitage des Carceri, véritable havre de paix où François et ses premiers frères aimaient se retirer. C'est un lieu qui pousse à la contemplation et à la méditation. J'y passerais bien quelques journées au milieu de ces beaux bois de chênes où le Saint conversait avec les oiseaux. Il faut juste se dire qu'à l'époque de François, c'était une grotte aménagée dans laquelle il vivait chichement de prières et de contemplation.

Cet après-midi nous allons continuer notre découverte de la ville et de son histoire ainsi que des spécialités de nourriture et de boissons italiennes.?

A demain. Je vous aime.

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Jour 72 Assise.

Hier soir nous avions décidé de monter au point le plus haut d'Assise pour profiter de la vue et du coucher de soleil. C'est donc à la Rocca Majore, château du 16e siècle en cours de rénovation que nous pique-niquons en attendant la mise au lit de frère soleil.

Ce matin nous assistons au cortège de la St-François où tous les écoliers de la ville, les habitants et les magistrats descendent de la place à la basilique St-François. Bill me poussait toujours à faire rire les enfants tandis que Grizzly ne comprenait pas pourquoi certains des participants se mettaient de lourdes tuniques sur le dos par un si beau temps.

A midi nous avons eu la chance de monter en haut de la tour Del Populo admirer la cloche qui y a été installée en 1929 à bout de bras et profiter d'un point de vue exceptionnel mais grillagé.

Ensuite après un excellent repas (merci Benja) nous sommes descendus à San Damiano, l'église où St-François reçut le message de rebâtir l'église. Il comprendra plus tard que c'était l'institution qui avait eu besoin d'un fameux coup de pied au cul. Ici je prends position en disant que cette situation est toujours d'actualité.

Il n'empêche, comme à l'ermitage des Carceri, cet endroit appelle au calme, à la prière et à la méditation. Ce n'est pas étonnant que l'ordre des Clarisses l'ait occupé aussi longtemps.

Maintenant il nous reste à remonter en ville par 2 km de jolies pentes.

Andiamo.

A demain. Je vous aime.

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Jour 73 Assise

Chers amis,

En vous livrant les photos de notre après-midi d'hier et de notre soirée "coucher de soleil" (dont une avec d'autres pèlerins), je prends aussi congé de vous.

En effet si notre retour n'est programmé que demain, notre journée d'aujourd'hui sera une remise en ordre de notre logement et la préparation de notre retour. Rien de bien intéressant pour vous.

Je voudrais vous dire toute la joie que j'ai prise dans notre relation de deux mois et demi. Vous avez été pour moi levain dans la pâte. Ce petit mot journalier m'empêchait quotidiennement de m'avachir dans la facilité d'un repos trop vite pris. Vos encouragements, remarques et gentillesses étaient un des moteurs de mes mollets et de mon moral. Vos conseils, suggestions ou invitations m'étaient souvent profitables. Merci à vous tous. Françoise, Bill, Grizzly, l'étourdi, Benaless, Jack, Freddy et Lapin se joignent à moi pour ce MERCI.

Rassurez-vous. Notre relation ne s'arrête pas là. Cette page va rester ouverte pour me laisser la possibilité de vous inviter peut-être à une soirée témoignage, à une conférence ou qui sait au lancement d'un livre. Le rêve est toujours permis.

Je suis heureux de vous avoir partagé cette expérience de vie. Elle a, elle va changer la mienne. Ma relation avec la mort, la Vraie Vie à déjà changé. Mon engagement dans cette existence risque de changer aussi dans une vision plus simple et tournée vers la défense de notre terre, des plus pauvres et des plus démunis. Oh! Je ne suis pas St-François, loin de là mais je sens la nécessité de vivre plus dans la simplicité et le sens de l'autre.

Demain je retrouve mes enfants, petits-enfants, mes amis proches, mon chien, ma yourte, mon petit coin de paradis.

Ce retour à ma vie sera je l'espère aussi un retour à la vie.

A bientôt. Je vous aime

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